Rapport sur la détermination préliminaire dans le cadre de l`enquête

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Rapport sur la détermination préliminaire dans le cadre de l`enquête
Royaume du Maroc
Ministère de l'Industrie, du Commerce, de
l'Investissement et de l'Economie Numérique
***
Ministère chargé du Commerce extérieur
‫ﺍﻟﻤﻤﻠﻜﺔ ﺍﻟﻤﻐﺮﺑﻴﺔ‬
‫ ﻭﺍﻟﺘﺠﺎﺭﺓ‬،‫ﻭﺯﺍﺭﺓ ﺍﻟﺼﻨﺎﻋﺔ‬
‫ﻭﺍﻹﺳﺘﺜﻤﺎﺭﻭ ﺍﻹﻗﺘﺼﺎﺩ ﺍﻟﺮﻗﻤﻲ‬
***
‫ﺍﻟﻮﺯﺍﺭﺓ ﺍﻟﻤﻜﻠﻔﺔﺏﺍﻟﺘﺠﺎﺭﺓ ﺍﻟﺨﺎﺭﺟﻴﺔ‬
Direction de la Politique des Echanges Commerciaux
Rapport préliminaire de l’enquête antidumping
sur les importations de tôles d’acier laminées à chaud
originaires de l’Union Européenne et de la Turquie
Détermination préliminaire de l’existence du dumping,
du dommage et du lien de causalité
1. PROCEDURE
1.1. OUVERTURE DE L’ENQUETE
1. Le Ministère délégué auprès du Ministre de l’Industrie, du Commerce, de l’Investissement et de
l’Economie Numérique et des Nouvelles Technologies chargé du Commerce Extérieur (MDCCE) a
initié, le 21 janvier 2013 par un avis public1 (ci-après dénommé « avis d’ouverture »), une enquête
antidumping concernant les importations de tôles d’acier laminées à chaud originaires de l’Union
Européenne et de la Turquie, et ce après avis de la Commission de Surveillance des Importations
(CoSI) réunie le 09 janvier 2013 tel que prévu par les dispositions de l’article 4 de la loi n° 15-09
relative aux mesures de défense commerciale (ci-après dénommée Loi 15-09)
2. Cette enquête a été initiée, conformément aux dispositions de l’article 16 de la loi 15-09, suite à la
réception, en date du 20 novembre 2012, d’une requête émanant de la Société MAGHREB STEEL.
3. Le MDCCE a procédé à l’examen de la cohérence et de l’adéquation des renseignements contenus
dans la requête, et ce conformément aux dispositions de l’article 24 du décret n° 2-12-645 pris pour
l’application de la loi n° 15-09 relative aux mesures de défense commerciale (ci-après dénommé
décret 2-12-645). Il a été ainsi conclu que les éléments de preuve présentés dans cette requête sur
l’existence du dumping des importations de tôles d’acier laminées à chaud originaires de l’Union
Européenne et de la Turquie et du dommage causé à MAGHREB STEELpar ces importations sont
suffisants pour justifier l’ouverture d’une enquête antidumping2.
1.2. INFORMATION ET COLLABORATION DES PARTIES INTERESSEES
4. Par l’avis d’ouverture et conformément aux dispositions de l’article 17 de la loi 15-09, Le MDCCE a
informé les parties intéressées de l’ouverture de ladite enquête et leur a donné la possibilité de faire
1
Il s’agit de l’avis public n°01/13 relatif à l’ouverture d’une enquête antidumping sur les importations des tôles d'acier
laminées à chaud originaires ou exportées des pays de l'Union Européenne et de la Turquie publié au quotidien « Le
Matin » édition n° 14 946 du 01/02/ 2013.
2
Le rapport d’ouverture d’enquête est publié sur le site web du MDCCE : http://www.maroc-trade.gov.ma(rubrique
mesures de défense commerciale)
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connaître leurs points de vue par écrit et de demander à participer à l’enquête dans les délais prévus
par l’avis.
5. Ainsi, le MDCCE a officiellement informé la Délégation de la Commission Européenne à Rabat, la
Turquie via sa représentation diplomatique à Rabat, les producteurs connus en Union Européenne de
tôles d’acier laminées à chaud exportées vers le Maroc (ARCELOR MITTAL, TATA STEEL, EVRAZ,
ARVEDI SPA et DUFERCO et ses filiales), les producteurs connus en Turquie de tôles d’acier laminées
à chaud exportées vers le Maroc (ERDEMIR et COLAKOGLU), les importateurs au Maroc de tôles
d’acier laminées à chaud tels que identifiés par la requête (ARCELOR SERV, COMAPROM, TOUFER,
BATIFER, SOFAFER, ETAF, TUBE ET PROFIL, AIC METALLURGIE, SOMACHAME, INTRAL INDUSTRIES,
LONGOFER, D.L.M. et OCID METAL) et le producteur national de tôles d’acier laminées à chaud
(MAGHREB STEEL).
6. De même, afin de collecter les renseignements nécessaires à l’enquête, le MDCCE a adressé aux
différentes parties intéressées les questionnaires d’enquête, conformément aux dispositions de
l’article 20 de la loi 15-09 en leur ménageant des délais suffisants pour transmettre leur réponse.
7. Le MDCCE a répondu favorablement à toutes les demandes de prorogation du délai de réponse au
questionnaire émanant des parties intéressées.
1.3. PERIODE DE L’ENQUETE
8. La période de l’enquête sur le dumping s’étend du 1erjanvier 2012 au 31 décembre 2012.
9. La période prise en compte pour l’analyse du dommage subi par la branche de production
nationale s’étend du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2012.
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2. PRODUITS OBJET DE L’ENQUETE ET PRODUITS SIMILAIRES
2.1 Produit objet de l’enquête
10. Les produits concernés par l’enquête sont les produits plats (tôles) en acier laminés à chaud, non
plaqués ni revêtus, d’une épaisseur inférieure à 20 mm pour les produits enroulés (bobines) et
supérieure à 5 mm pour les produits non enroulés (tôles fortes), originaires des pays de l’Union
Européenne (UE) et de la Turquie, à l’exclusion de ceux présentant des motifs en relief.
11. Les tôles d’acier laminées à chaud ont diverses utilisations : acier doux pour emboutissage ou
pliage à froid (tubes, électroménager, mobilier en métal, …), aciers de construction d’usage général
(conteneurs, réservoirs, profils pour la construction de bâtiments, …) et aciers pour bouteilles à gaz
soudées.
12. Ces produits sont importés sous les nomenclatures douanières du système harmonisé SH
suivantes : 7208 (à l’exception du 7208.10 et 7208.40), 7211.13, 7211.14 et 7211.19.
2.2 Produit similaire
13. Conformément aux dispositions de l’article 2 de la loi 15-09, on entend par produit similaire « le
produit semblable à tous égards au produit considéré ou, en l’absence d’un tel produit, tout autre
produit qui présente des caractéristiques ressemblant étroitement à celles du produit considéré ».
2.2.1 Similarité entre le produit considéré et les tôles d’acier laminées à chaud fabriquées
localement
14. Les produits fabriqués par MAGHREB STEEL sont des tôles en acier laminées à chaud sous forme
de bobines enroulées et coupées (dites « LAC ») et de tôles fortes (dites « TF ») à l’exception des
tôles présentant des motifs en relief.En dehors des tôles laminées à chaud fabriquées par MAGHREB
STEEL et destinées à son propre approvisionnement pour l’activité du laminage à froid, ces produits
sont destinés aux mêmes utilisations que les tôles importées.
15. Le procédé de fabrication utilisé par MAGHREB STEEL est un procédé sidérurgique standard de
laminage à chaud. Il commence par l’introduction de la matière première (ferraille) dans l’aciérie
électrique pour en sortir sous forme de brame. La brame alimente par la suite le laminoir à chaud qui
produit les deux formes connues de tôles : bobines (« LAC ») ou tôles fortes (« TF »).
16. Plus en détail, le processus de fabrication des tôles d’acier laminées à chaud adopté par
MAGHREB STEEL est comme suit :
Pour les LAC :
Après le passage dans un four de réchauffage qui porte les brames à plus de 1 000 °C, le métal est
acheminé surdes rouleaux motorisés. Progressivement, par un passage successif dans différentes
cages équipées decylindres refroidis à l'eau, le métal perd en épaisseur et gagne en longueur. A la
sortie, il est obtenu de latôle en bobines laminées à chaud d’une gamme d’épaisseurs allant de 0.7
mm à 20 mm.
Pour les TF :
Après passage dans un four de réchauffage qui porte les brames à plus de 800 °C, le métal est
acheminé surdes rouleaux motorisés. Progressivement, par un passage successif dans différentes
cages équipées decylindres refroidis à l'eau, le métal perd en épaisseur et gagne en longueur. A la
sortie, nous obtenons desplaques laminées à chaud d’une gamme d’épaisseurs allant de 4.75 mm à
150 mm.
17. Selon les renseignements fournis par MAGHREB STEEL, ses tôles en acier laminées à chaud sont
fabriquées conformément aux exigences des normes internationales et européennes en particulier.
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Ainsi, le produit similaire fabriqué localement possède des caractéristiques dimensionnelles, physicochimiques et de qualité similaires à celles du produit considéré, d’autant plus que ces deux produits
sont fabriqués à partir des mêmes intrants et selon des procédés de fabrication similaires.
18. En conséquence, les importateurs perçoivent indifféremment les deux produits (importés et
fabriqués localement), et ce sont donc les considérations du prix bas qui orientent le choix des
utilisateurs finaux vers le produit importé.
19. Ces éléments permettent au MDCCE de considérer, à titre provisoire, queles tôles fabriquées
localement sont similaires aux tôles importées.
2.2.2 Similarité entre le produit considéré et les tôles d’acier laminées à chaud fabriquées et
vendues en Union Européenne et en Turquie
20. D’après les renseignements contenus dans les réponses aux questionnaires d’enquête remis par
les différents producteurs exportateurs européens et turcs, les tôles d’acier laminées à chaud
exportées vers le Maroc sont soit identiques soit similaires à celles fabriquées et vendues sur leurs
marchés domestiques.
21. Par conséquent, sur la base des déclarations des producteurs exportateurs étrangers, le MDCCE
considère, à titre provisoire, que les tôles d’acier laminées à chaud fabriquées et vendues en Union
Européenne et en Turquie sont similaires au produit considéré.
3. INDUSTRIE NATIONALE (BRANCHE DE PRODUCTION NATIONALE)
22. L’entreprise MAGHREB STEEL est l’unique producteur de tôles d’acier laminées à chaud au Maroc
et réalise, par conséquent, 100% de la production nationale de ce produit. Ainsi, aux fins de la
présente enquête, le MDCCE considère que MAGHREB STEEL constitue la branche de production
nationale de tôles d’acier laminées à chaud au sens de l’article 5 de la loi 15-09 qui prévoit que la
branche de production nationale s’entend de « l’ensemble des producteurs marocains du produit
similaire, ou ceux d’entre eux dont les productions additionnées constituent une proportion majeure
de la production nationale totale de ce produit ».
4. DETERMINATION DE L’EXISTENCE DU DUMPING
23. L’article 6 de la loi 15-09 stipule qu’ : « un produit importé est considéré comme faisant l’objet
d’un dumping si son prix à l’exportation vers le Maroc est inférieur à sa valeur normale ».
24. Ainsi, pour déterminer l’existence ou non de dumping, il est nécessaire de disposer de deux
paramètres : prix d’exportation et valeur normale.
25. Ces deux paramètres doivent être ajustés en vue d’une comparaison équitable telle que prévue
par l’article 9 de la loi 15-09 qui précise que « la marge de dumping d’un produit est constituée par la
différence entre son prix à l’exportation et la valeur normale de ce produit. Cette marge de dumping
est établie sur la base d’une comparaison équitable entre le prix à l’exportation et la valeur normale
du produit considéré. »
26. Par ailleurs, l’article 8 du décret 2-12-645 indique que « […] la comparaison équitable entre le prix
à l’exportation et la valeur normale, visée au paragraphe 1 de l’article 9 de la loi n° 15-09 susvisée, est
faite au même niveau commercial qui est de préférence le stade sortie usine et pour des ventes
effectuées à des dates aussi voisines que possible. »
4.1 DETERMINATION DU PRIX D’EXPORTATION
27. L’article 7 de la loi 15-09 prévoit que « Le prix d’exportation d’un produit, visé à l’article 6 cidessus, s’entend du prix effectivement payé ou à payer pour le produit considéré vendu à l’exportation
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vers le Maroc ».
28. Les données mises à la disposition du MDCCE ont permis de dégager les prix d’exportation
pratiqués par les producteurs-exportateurs ARCELOR MITTAL, ERDEMIR et COLAKOGLU lorsqu’ils
exportent les produits objets de l’enquête vers le Maroc au cours de la période d’enquête.
29. Il est à noter qu’un quatrième exportateur est inclus dans cette enquête qui est STEEL LINK.
Cependant, du fait qu’il est un simple exportateur des produits objets de l’enquête vers le Maroc et
n’exerce aucune activité de production industrielle, le MDCCE a jugé plus opportun d’exploiter les
données du producteur-fournisseur de STEEL LINK, à savoir TATA STEEL qui a répondu au
questionnaire de l’enquête. Plus précisément, la totalité des exportations des produits objets de
l’enquête réalisées par STEEL LINK vers le marché marocain sont des produits fabriqués par TATA
STEEL.
30. Ainsi, pour déterminer le prix d’exportation pratiqué par l’exportateur STEEL LINK, le MDCCE s’est
basé sur les ventes des produits concernés réalisées entre TATA STEEL et STEEL LINK au stade « sortie
usine ». En vendant ses produits à STEEL LINK, TATA STEEL connaît d’avance qu’ils sont destinés au
marché marocain, ce qui signifie que le processus de fixation des prix commence chez TATA STEEL et
la marge bénéficiaire ainsi que les autres charges supportées par STEEL LINK peuvent être considérés
comme des ajustements nécessaires afin de remonter au prix d’exportation sortie usine de TATA
STEEL destiné au Maroc.
31. Ces prix d’exportation ont fait l’objet d’ajustements pour être rendus au stade « sortie usine ».
Les ajustements, effectués pour chaque transaction d’exportation au Maroc, ont concerné les coûts
des crédits octroyés pour les délais de paiement et le transport international.
4.2 DETERMINATION DE LA VALEUR NORMALE
32. L’article 8 de la loi 15-09 stipule que :
« La valeur normale visée à l’article 6, ci-dessus, est déterminée sur la base :
1- du prix comparable, pratiqué au cours d’opérations commerciales normales pour le produit
similaire, destiné à la consommation dans le pays exportateur. Toutefois, lorsque le produit ne
fait que transiter par le pays d’exportation ou lorsqu’il n’y a pas de production de ce produit ou
qu’il n’y a pas de prix comparable dans ce pays d’exportation, la valeur normale peut être
établie sur la base du prix du produit similaire, destiné à la consommation dans le pays
d’origine.
2- Dans le cas où aucune vente du produit similaire n’a eu lieu au cours d’opérations
commerciales normales sur le marché intérieur du pays exportateur ou lorsque, du fait de la
situation particulière de ce marché ou du faible volume des ventes sur ce marché, de telles
ventes ne peuvent pas servir de référence pour la détermination de la valeur normale, cette
valeur normale est établie sur la base :
a) Soit du prix comparable du produit similaire lorsque celui-ci est exporté à destination
d’un pays tiers, à condition toutefois que les ventes à l’exportation vers ce pays tiers
soient effectuées selon les mêmes critères ;
b) Soit du coût de production dans le pays d’origine majoré d’un montant représentant
les frais d’administration et de commercialisation, les frais généraux et une marge
bénéficiaire raisonnable. »
33. Toutefois, en absence de réponses aux questionnaires ou au cas où les réponses sont
incomplètes, la loi 15-09 prévoit dans son article 21 que l’autorité chargée de l’enquête peut
procéder à l’évaluation du dumping, du dommage et du lien de causalité « sur la base des meilleurs
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renseignements disponibles ».
34. En réponse aux prescriptions des articles 8 de la loi 15-09 et l’article 4 du décret 2-12-645, le
MDCCE a examiné, pour chaque producteur exportateur ayant participé à l’enquête, si le volume
total des ventes domestiques du produit similaire à des acheteurs indépendants en Union
Européenne ou en Turquie était suffisamment représentatif, c’est-à-dire s’il représentait au moins 5%
du volume total des exportations du produit concerné vers le Maroc durant la période de l’enquête.
35. Le MDCCE a pu conclure alors que, pour l’ensemble des producteurs exportateurs ayant participé
à l’enquête, les ventes domestiques étaient globalement représentatives par rapport aux
exportations vers le Maroc.
36. Ce test de représentativité a été aussi établi par type de produit concerné. Le MDCCE a examiné si
le volume des ventes domestiques, en Union Européenne ou en Turquie, de chaque type du produit
similaire était représentatif. Les ventes domestiques d’un type de produit ont été considérées
représentatives lorsque le volume des ventes domestiques de ce type de produit à des acheteurs
indépendants constituait au moins 5% du volume des exportations de ce type de produit vers le
Maroc pendant la période de l’enquête.
37. Le MDCCE a conclu que, pour l’ensemble des producteurs exportateurs ayant participé à
l’enquête, les ventes domestiques par type de produit n’étaient pas toutes représentatives.
38. Ainsi, conformément aux dispositions prévues aux paragraphes 1) et 2) de l’article 8 ci-dessus, le
MDCCE s’est basé pour l’évaluation de la valeur normale soit sur le prix comparable du produit
identique ou similaire destiné à la consommation dans le pays d’origine lorsque les ventes
domestiques du type de produit concerné sont représentatives soit sur le coût de production dans le
pays d’origine majoré d’un montant représentant les frais d’administration et de commercialisation,
les frais généraux et une marge bénéficiaire raisonnable dans les cas où les ventes domestiques du
type de produit identique ou similaire n’étaient pas représentatives .
39. Par la suite, le MDCCE a examiné, pour chaque producteur exportateur ayant participé à
l’enquête, si les ventes domestiques du produit considéré ont été réalisées au cours d’opérations
commerciales normales.
40. Dans cet objectif, le MDCCE a calculé, conformément à l’article 3 du décret 2- 12-645, pour
chaque type du produit considéré, la proportion des ventes domestiques à perte conclues avec des
acheteurs indépendants pendant la période de l’enquête.
41. Quand le volume des ventes domestiques à perte d’un type de produit représentait plus de 20%
du volume total des ventes domestiques de ce type de produit, la valeur normale a été basée sur le
prix domestique en calculant la moyenne pondérée des prix des seules ventes domestiques rentables
de ce type de produit réalisées au cours de la période d’enquête. Les prix de ventes utilisés dans ce
calcul sont des prix « sortie usine ».
42. Quand le volume des ventes domestiques à perte d’un type de produit représentait moins de 20%
du volume total des ventes domestiques de ce type de produit, la valeur normale a été basée sur le
prix domestique en calculant la moyenne pondérée des prix de toutes les ventes domestiques de ce
type de produit réalisées au cours de la période d’enquête, que ces ventes aient été rentables ou
non. Les prix de ventes utilisés dans ce calcul sont des prix « sortie usine ».
43. Quand la totalité du volume d’un type de produit considéré a été vendue à perte, le MDCCE a
procédé à la construction de la valeur normale telle que prévue au paragraphe 2) de l’article 8 de la
loi 15-09 et à l’article 6 du décret 2-12-645, c'est-à-dire sur la base du coût de production majoré d’un
montant représentant les frais d’administration et de commercialisation, les frais généraux et une
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marge bénéficiaire raisonnable.
44. Dans le calcul de valeur normale, tel que prévu dans le point 43 ci-dessus, lorsque les montants
moyens ou les pourcentages moyens des frais d’administration et de commercialisation, des frais
généraux et de la marge bénéficiaire ne sont pas fournis par le producteur exportateur, le MDCCE a
procédé au calcul de leurs parts à partir des ventes intérieures du produit identique réalisées au
cours d’opérations commerciales normales, pendant la période d’enquête.
45. Cependant, quand cela semblait plus approprié, le MDCCE s’est basé, pour déterminer la part de
la marge bénéficiaire, conformément à l’article 6 du décret 2-12-645, sur les documents comptables
de l’exportateur ou d’un autre exportateur du produit similaire sur le même marché.
46. Chaque producteur exportateur ayant collaboré à l’enquête reçoit le détail du calcul qui a permis
d’obtenir ses valeurs normales et aura la possibilité de faire connaître son point de vue.
4.3 COMPARAISON
47. L’article 9 du décret 2-12-645 stipule que :
« La marge de dumping est établie sur la base :
a) D’une comparaison entre une moyenne pondérée des valeurs normales et une moyenne
pondérée des prix de toutes les transactions à l’exportation ;
b) D’une comparaison entre les valeurs normales et les prix à l’exportation, transaction par
transaction ; ou
c) D’une comparaison entre une moyenne pondérée des valeurs normales et les prix à
l’exportation transaction par transaction s’il est constaté que, d’après leur configuration, les
prix à l’exportation différent notablement entre différents acheteurs, régions ou périodes et si
une explication est donnée quant à la raison pour laquelle il n’est pas possible de prendre
dûment en compte de telles différences en utilisant les méthodes de comparaison visées aux
alinéas a) et b) du présent article.
La marge de dumping en pourcentage est obtenue par le rapport entre la marge de dumping en
absolu et la moyenne pondérée des prix à l’exportation du produit considéré. »
48. Conformément aux dispositions de l’alinéa a) de l’article 9 du décret 2-12-645, le MDCCE a
comparé la moyenne pondérée des valeurs normales et la moyenne pondérée des prix à
l’exportation.
49. La valeur normale et le prix à l’exportation ont été comparés sur une base sortie usine.
4.4 MARGE DE
DUMPING
50. Sur la base de ce qui précède, les taux de marge de dumping provisoire, exprimées en
pourcentage du prix d’exportation, pour les exportateurs ayant coopéré à l’enquête s’établissent
comme suit :
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Tableau n°1 : Taux de marge de dumping provisoire par exportateurs
Société
Origine
Taux de marge de dumping provisoire
ARCELOR MITTAL
Union européenne
60,42%
TATA STEEL
Union européenne
22,11%
STEEL LINK
Union européenne
22,11%
COLAKOGLU
Turquie
1,97%
ERDEMIR
Turquie
0%
Les autres exportateurs installés en Union Européenne et en Turquie n’ayant pas participé à
l’enquête seront soumis au taux de marge de dumping résiduel.
4.5 CONCLUSION SUR L’EXISTENCE DU DUMPING
51. Sur la base de ses travaux d’enquête, le MDCCE a déterminé, à titre provisoire, que les
exportations vers le Maroc des tôles d’acier laminées à chaud originaires de l’Union Européenne se
font à des prix de dumping selon les marges par exportateurs figurant au tableau n° 1 de la section
4.4 ci-dessus.
5. DETERMINATION DE L’EXISTENCE D’UN DOMMAGE IMPORTANT
52. L’article 5 de la loi 15-09 définie le dommage comme :
« […] 2) dommage : le préjudice important causé à une branche de production nationale, la
menace de préjudice important pour une branche de production nationale ou le retard important
dans la création d’une branche de production nationale. »
53. Dans le cas de la présente affaire, sur la base des éléments contenus dans la requête de la partie
plaignante et dans le rapport d’ouverture de l’enquête, le dommage subi par la branche de
production nationale prend la forme de retard important dans la création d’une branche de
production nationale.
5.1 JUSTIFICATION
DE L’APPLICATION DU TEST DE RETARD IMPORTANT DANS LA CREATION D’UNE BRANCHE DE
PRODUCTION NATIONALE
54.Différentes parties intéressées, notamment les exportateurs et la Commission Européenneont
indiqué dans leurs commentaires qu’il n’est pas approprié dans le cas d’espèce de justifier le
dommage par le retard important dans la création d’une branche de production nationale et ont par
conséquent remis en cause l’existence d’un dommage subi par MAGHREB STEEL.
55.Dans leurs commentaires, lesdites parties intéressées ont allégué l’inexistence d’un retard
important dans la création d’une branche de production nationale. En particulier, les exportateurs
soutiennent que ledit retard important dans la création ne peut exister dès lors que, au jour de
l’ouverture de l’enquête antidumping, il existait une production nationale du produit concerné au
Maroc. Par ailleurs, ces derniers invoquent qu’une industrie nationale existe dès lors qu’elle dispose
d’une structure et d’installations de production et qu’elle débute la fabrication et par conséquence, il
est infondé de plaider l’existence d’un retard important dans la création d’une branche de production
nationale.
56. Les allégations des exportateurs sont basées sur la thèse selon laquelle le critère du retard
important « peut être utilisé uniquement pour démontrer l’incapacité d’une industrie nationale à
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démarrer la production du produit en cause »3. Aussi, la Commission Européenneaindiquéque: « to
claim “material retardation” the company has to be a complete new establishment in a certain
segment of the industry »4.
57. Pourpreuve, la Commission Européenne ainsi que les exportateurs ayant transmis des
commentaires à ce sujet se sontappuyés sur le cas de l’affaire DRAM5où la Commission européenne a
considéré que lorsqu’une industrie disposedéjàd’installations de production et que la fabrication du
produit en cause a déjà débuté, le dommage subi du fait d’importation en dumping nepeutêtreétabli
sur la base du retard important dans la créationd’une branche de productionnationalemais doit être
établi sur la base de l’existenced’un dommageimportant.
58. Toutefois, rien dans l’Accord Antidumping de l’OMC ni dans la législation marocaine applicable ne
vient au soutien d’une telle affirmation. En effet, la notion de retard important dans la création d’une
branche de production nationale est visée par l’Accord Antidumping de l’OMC et, plus
particulièrement, par la note de bas de page numéro 9 de son article 3, laquelle dispose que : « Pour
les besoins du présent accord, le terme “dommage” s’entendra, sauf indication contraire, d’un
dommage important causé à une branche de production nationale, d’une menace de dommage
important pour une branche de production nationale ou d’un retard important dans la création d’une
branche de production nationale ; il sera interprété conformément aux dispositions de cet article ».
59. Ainsi, l’Accord Antidumping n’impose pas, explicitement ou implicitement, une utilisation du
critère du retard important que dans les hypothèses d’industries totalement nouvelles qui n’auraient
pas débuté la production ou la commercialisation. Quant à la législation marocaine, elle ne précise
pas non plus que ledit critère doit être interprété d’une manière aussi restrictive que celle alléguée
par les exportateurs et la Commission européenne.
60. Par ailleurs, le MDCCE estime qu’il est approprié pour les besoins d’interprétation de la notion de
« retard important » visée par l’Accord Antidumping de se référer aux travaux préparatoires de
l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (ci-après, le « GATT »).
61. La doctrine se consacrant à l’étude de la notion de « retard important » indique que les
précédents législatifs de la loi antidumping américaine ayant inspiré la rédaction du GATT mettent en
évidence que de telles normes avaient été introduites afin de protéger l’industrie américaine des
colorants, qui s’efforçait de s’établir pleinement. Il était en conséquence évident que le principe
relatif à l’établissement s’appliquait aux industries débutant tout juste leur production.6
62. De même, le paragraphe 5 de l’article VI du texte original du GATT, soumis à la signature en 1947,
condamne le dumping en ce sens qu’il « fait obstacle à la création d’une production nationale ou la
retarde sensiblement ». En vertu du texte actuellement en vigueur du GATT, suite à l’amendement
opéré par le Protocole de Genève du 14 septembre 1948 et ayant modifié la Partie II, ainsi que
l’article XXVI du GATT, les paragraphes 1 et 6.a) de l’Article VI ne font mention que de l’expression
3
« Commentaires présentés par le CIB (Association Turque des exportateurs de produits en acier) sur le rapport
d’ouverture et l’avis public relatifs à l’enquête antidumping sur les importations de tôles d’acier laminées à chaud
originaires ou exportées des pays de l’Union européenne et de la Turquie », présentés le 22 mars 2013, page 13.
4
Commentaires présentés le 19 février 2013 par la Direction générale du commerce de la Commission européenne au
Rapport d’Ouverture, page 3.
5
Règlement (CEE) n° 165/90 de la Commission du 23 janvier 1990 instituant un droit antidumping provisoire sur les
importations de certains types de microstructures électroniques dites "DRAM" (dynamicrandomaccessmemories)
originaires du Japon, portant acceptation d'engagements offerts par certains exportateurs dans le cadre de la procédure
antidumping concernant les importations de ces produits et portant clôture de l'enquête en ce qui concerne les
exportateurs en cause, JOCE du 20 janvier 1990, L 20 , p. 5.
6
Cf. DONG WOO S., « Material Retardation Standard in the US Antidumping Law », Law and Policy in International
Business,Harvard Law School, 1992.
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« retard important »7. Les mêmes termes figurent à la note de bas de page nº 2 de l’Article 3 du Code
antidumping, élaboré en 1979 dans le cadre du GATT.
63. Que les rédacteurs du GATT distinguent entre l’expression « faire obstacle à la création » et
l’expression « la retarde sensiblement » est un élément très significatif.
64. En revenant sur le critère de « l’industrie établie », on retrouve que la pratique internationale
confirme l’application du test du retard important non seulement lorsque l’industrie nationale n’a
pas encore débuté la commercialisation du produit, mais également dans les hypothèses où celle-ci
se trouve dans un état initial au jour de l’ouverture de l’enquête, autrement dit, lorsque l’industrie
nationale se trouve engagée dans un processus d’établissement.
65. Ceci permet de dire queles allégations présentées en l’espèce par les exportateurs et la
Commission européenne, selon lesquelles une industrie est établie au jour de la mise en œuvre de
son activité de production, sont réfutables. Diverses autorités d’enquête ont signalé que le test du
retard important est applicable dans les hypothèses où l’industrie de référence a débuté son activité
de production mais n’a pas encore atteint une présence stable sur le marché national8.
66. A titre d’exemple, les premiers cas d’application du critère du retard important ont d’abord surgi
aux États-Unis. En vue d’éviter toute erreur concernant l’application du critère du retard important
uniquement aux industries n’ayant pas encore débuté leur production, lesdites autorités ont
confirmé dès l’origine que les protections offertes par la clause relative au retard important n’étaient
« pas limitées aux industries n’ayant pas encore débuté la production, mais s’étend[aient] également
aux nouvelles installations [de production] »9.
67. De même, l’autorité indienne a également analysé des affaires dans le cadre desquelles l’industrie
de référence avait débuté l’activité de production peu avant la date d’ouverture de l’enquête. À
l’instar des autorités américaines, l’autorité indienne a qualifié ces industries de « naissantes » et
jugé que « bien que l’industrie naissante […] ait récemment débuté la production, cette dernière
cherche encore sa place sur le marché. L’industrie nationale n’est pas en mesure d’atteindre un niveau
satisfaisant eu égard à sa capacité de production ainsi que de trouver sa place sur le marché dès lors
que, à l’état naissant, les industries nationales font face à des retards importants causés par des
importations en provenance des pays en cause dont les prix font l’objet de dumping »10.
68. En allant plus en détail dans l’examen du critère temporel, on relève que les autorités
américaines ont appliqué le test du retard important dans des cas où des industries avaient débuté
leurs activités presque deux ans avant l’ouverture de l’enquête.
69. En effet, dans l’affaire Certain DriedSaltedCodfishfrom Canada, l’industrie nationale n’était
composée que d’une seule société, Codfish Corporation. Ladite société avait débuté ses activités au
mois de novembre de l’année 1982. Compte tenu de la baisse des prix à l’importation, Codfish
Corporation avait connu de fortes pertes d’exploitation de l’année 1982 jusqu’au quatrième trimestre
7
Protocole ayant amendé la Partie II et l’Article XXVI du GATT, 14 septembre 1948, 62 Stat. 3679, 62 U.N.T.S. 80.
8
Cf. BMT Commodity Corp. c/ United States, 11 Ct. Int’l Trade 524, 525-26 (1987), confirmée par, 852 F.2d 1285 (Fed. Cir.
1988), rejet de la certification, 489 U.S. 1012 (1989).
9
Cf. Certain Dried Salted Codfishfrom Canada, USITC Pub. 1571, Inv. Nº 731-TA-199 (Sept. 1984) (prélim.), 4 ;Cf. : Certain
All-Terrain Vehicles from Japan, USITC Pub. 2163, Inv. Nº 731-TA-388 (Mars 1989) (final), 21 nº 65, 14 ;Fresh and Chilled
Atlantic Salmon from Norway, USITC Pub. 2272, Inv. Nº 701-TA-302 et 731-TA-454 (avril 1990) (prélim.), 15, « Le fait qu’il
existe une certaine production nationale n’exclut pas la possibilité que l’industrie nationale ne soit pas établie ».
10
Cf. D (-) Para Hydroxy Phenyl Glycine Methyl Potassium Dane Salt Originatingfrom China PR and Singapore, Gazette of
India (Extraordinary), PartieI, Section I, 24 juin 2003, 41.
AD.4.13.UE/TUR
Non confidentiel
10
de l’année 1984. Elle présenta, le 19 juillet 1984, une requête antidumping au motif du dommage
consistant en un retard important.
70. D’après son analyse, l’autorité Antidumping américaine (la Commission du commerce
international, ci-après, la « CCI ») a jugé que : « l’application du critère du retard important n’est pas
limitée aux industries qui n’ont pas encore débuté leur production mais s’étend également aux
installations qui ont initié leur production et qui n’ont pas encore consolidé leur exploitation ; (2) dès
lors que la tentative d’établir une nouvelle industrie est par nature unique, il doit être répondu à la
question de savoir si l’établissement d’une industrie est matériellement retardé au cas par cas »11.
71. La CCI a examiné si le cas de cette enquête portait sur un dommage important ou sur une
menace, plutôt que sur un retard important. Mais, du fait que l’industrie « n’a jamais été en mesure
de consolider sa production même à un niveau proche du seuil raisonnable de rentabilité »12, la CCI a
conclu que ses activités n’avaient jamais été « établies » et, dès lors, que le critère du retard
important constituait en l’espèce le principe juridique applicable.
72. Les commentaires des exportateurs reçus par le MDCCEont fait allusion au critère temporel
comme un élément utile afin de déterminer si MAGHREB STEEL est une industrie établie. Ils ont
soulevé que :
a. la décision de développer un complexe de laminage à chaud nécessaire à la production du
produit en cause a été adoptée en 2007 et que la mise en place des équipements nécessaires à la
production a été achevée en 201013.
b. MAGHREB STEEL a été constituée en 1975 et a créé sa production de laminé à froid en 200114,
soit il y a plus de 10 ans15.
73. Cependant, pour analyser le dommage du point de vue du retard important, le MDCCE se base
sur le temps écoulé entrela mise en œuvre par l’industrie nationale de la production et de la
commercialisation du produit objet de l’enquête et, d’autre part, la présentation de la requête dans
laquelle figurent les preuves attestant du dommage. Cette démarche ne s’écarte pas de la pratique
internationale citée ci-dessus.
74. En effet, MAGHREB STEEL a débuté la production des LAC au mois de juin 2010, ce qui représente
28 mois avant que l’entreprise ne dépose officiellement sa requête antidumping auprès du MDCCE.
Quant à la mise en œuvre de la production de TF par MAGHREB STEEL, elle n’a eu lieu qu’au mois de
mai 2012, c’est-à-dire au cours de l’année de dépôt de la requête en question.
11
Traductionde: "(1) application of the material retardation standard is not limited to industries that have not yet begun
production, but extends as well to new facilities that have initiated production but have not yet stabilized their operations;
(2) because the attempt to establish a new industry is inherently unique, determination of whether the establishment of
an industry is materially retarded is to be made on a case-by-case basis” Cf. : Thin Sheet Glass from Switzerland, Belgium,
and the Federal Republic of Germany, Inv. Nº 731-TA-127, 128, et 129, USITC Pub. Nº 1376 (1983) (décision provisoire en
matière de dumping) ; Certain Commuter Airplanesfrom France and Italy, Inv. Nº 701-TA-174 et 175, USITC Pub. Nº 1296
(1982) (décision provisoire en matière de dumping) ; Salmon Gill Fish Netting of ManmadeFibersfromJapan, Inv. Nº 751TA-5, USITC Pub. Nº 1234 (1982) (Examen de pratiques de dumping en application du paragraphe 751(b) de la loi HawlaySmoot de 1930).
12
Cf. note 8Cf. BMT Commodity Corp. c/ United States, 11 Ct. Int’l Trade 524, 525-26 (1987), confirmée par, 852 F.2d 1285
(Fed. Cir. 1988), rejet de la certification, 489 U.S. 1012 (1989).
13
« Commentaires présentés par le CIB (Association Turque des exportateurs de produits en acier) sur le rapport
d’ouverture et l’avis public relatifs à l’enquête antidumping sur les importations de tôles d’acier laminées à chaud
originaires ou exportées des pays de l’Union européenne et de la Turquie », présentés le 22 mars 2013.
14
Commentaires présentés le 19 février 2013 par la Direction générale du commerce de la Commission européenne au
Rapport d’Ouverture
15
Cf. Commentaires au Rapport d’ouverture présentés par ARCELOR MITTAL FLAT CARBON EUROPE du 5 avril 2013.
AD.4.13.UE/TUR
Non confidentiel
11
75. Dans le cas d’une industrie naissante présentant de telles caractéristiques, opter pour la situation
de « retard important » est non seulement possible mais encore la méthode la plus efficace et la plus
logique afin de procéder à l’analyse de l’existence d’un dommage.
76. De plus, la pratique internationale communément suivie et généralement adoptée dans l’analyse
de la détermination de l’existence d’un dommage important suppose disposer d’informations
historiques sur une période de 3 à 5 ans, voire 6 ans avant l’ouverture de l’enquête, chose qui est
impossible dans le cas de MAGHREB STEEL. Une telle démarche ne permettrait pas de rendre une
image fidèle de l’entreprise en raison de sa récente situation, puisque la production et la
commercialisation de certains produits considérés ne datent que de 8 mois avant l’ouverture de
l’enquête.
77. De même qu’il est indispensable de considérer la nature du produit concernédans la
détermination du temps nécessaire pour qu’une industrie déterminée puisse être réputée établie.
Dans le cas présent, la stabilisation de la production et de la commercialisation d’un produit comme
les tôles en acier laminées à chaud requière, au moins, un délai supérieur à deux ans en raison des
forts coûts d’entrée de l’équipement nécessaire, de la période de démarrage, ainsi que de la
consolidation du processus de production et du réseau de commercialisation.
78. Par ailleurs, La Commission européenne et les exportateurs allèguent de manière réitérée que
MAGHREB STEEL jouissait déjà d’une « importante part de marché sur le marché marocain »16au jour
de la présentation de sa requête et qu’elle « a atteint une part de marché passant de 26,7 à 38% »17.
79. Cependant, dans la pratique internationale, le test du retard important a également été appliqué
aux industries qui avaient déjà atteint une part de marché significative au sein du marché
domestique.
80. Par exemple, dans l’affaire BenzylParabenfromJapan18, la CCI a jugé que, même lorsque
l’industrie nationale dispose de la majorité des parts de marché au cours de la période de production
examinée, elle peut toutefois conclure que son activité n’est pas stabilisée si les « informations
relatives aux parts de marché dans le cadre de l’enquête […] concernent des ventes réalisées à un
nombre très limité d’acheteurs et couvrent une période fort restreinte, [ne pouvant] considérer ce
nombre comme révélateur d’une quelconque tendance stable eu égard aux parts de marché ».
81. Il en découle que l’analyse de la CCI dans cette affaire l’a amené à considérer que les parts de
marché d’une industrie nationale ne sont pas particulièrement révélatrices du caractère stable de son
activité.
82. En outre, dans son analyse de la présente affaire, le MDCCE s’est basé sur un autre critère,
l’atteinte du seuil de rentabilité (break even) qui est sans doute le critère le plus utilisé dans la
pratique internationale afin d’apprécier si une entreprise est établie au sens de l’article 3 de l’Accord
Antidumping.
83. Une entreprise atteint son seuil de rentabilité lorsque la totalité de ses recettes est égale à la
totalité de ses coûts. Cependant, Selon la pratique internationale, lorsqu’une industrie doit encore
absorber de nombreux coûts de démarrage, elle s’avère rarement stable financièrement, le test du
retard important étant alors pleinement applicable. Ainsi, dans des affaires où l’industrie nationale
16
Cf. Commentaires présentés le 19 février 2013 par la Direction générale du commerce de la Commission européenne au
Rapport d’Ouverture
17
Cf. Commentaires présentés le 19 février 2013 par la Direction générale du commerce de la Commission européenne au
Rapport d’Ouverture
18
Cf. Benzyl Paraben from Japan, USITC, Pub 2355, Inv. Nº 731-TA-462 (février 1991) (final), 15 : "information regarding
market share in [that] investigation . . . concerns sales to such a limited number of purchasers and covers such a short
period of time that [the ITC cannot] believe these numbers to be indicative of any stable market share trends.”
AD.4.13.UE/TUR
Non confidentiel
12
présentait de telles caractéristiques, l’autorité américaine a octroyé un poids conséquent à l’analyse
du seuil de rentabilité19.
84. Dans le meme sens de réflexion, le panel de l’OMCs’estprononcé, à travers l’affaire“Korea - AntiDumping Duties On Imports Of Polyacetal Resins From The United States”, surle critèred’atteintedu
seuilde rentabilitédansle cadre du principe du retard important : “[the] Panel did not reach the
question of whether the Agreement allowed for a finding of material retardation of the establishment
of a domestic industry where, as in this case, that industry had acquired a market share of 47.7 per
cent in its first year of operation and had installed new production capacity. The Panel noted however
that under the "break-even" analysis performed by the Korean authorities it seemed possible to find
material retardation of the establishment of an industry whenever an industry expanded its
production capacity of the like product”20.
85. Autrement dit, le panel de l’OMC affirme que le seuil de rentabilité constitue un critère pertinent
devant être apprécié afin de déterminer si une industrie n’est pas encore stabilisée et qu’il convient,
par conséquent, d’appliquer le test du retard important.
86. Dans le cas de la présente enquête, les données de MAGHREB STEEL montrent que l’entreprise
est bien loin d’atteindre le seuil de rentabilité.
Tableau n°2 :Seuilde rentabilité de l’activité LAC de MAGHREB STEEL
Seuil de rentabilité
Source : Données collectées auprès de MAGHREB STEEL
Volume
XXXX
87. En effet, pour l’activité des LAC, la production réalisée par MAGHREB STEEL au cours de l’année
2012 représente à peine les 63% de son seuil de rentabilité dans une conjoncture normale de
marché,ce qui laisse l’entreprise loin d’un niveau de production où au moins elle ne réaliserait pas de
perte.
88. D’après les informations ci-dessus, il convient de conclure que MAGHREB STEEL n’a pas encore
atteint le seuil de rentabilité et n’est pas, par conséquent, une industrie établie.
89. Outre les critères précédents examinés par le MDCCE, il importe de souligner que selon la
pratique internationale, un autre élément influe également sur la qualification d’une industrie
comme « industrie non encore établie », au sens de l’article 3 de l’Accord Antidumping, à savoir
l’évolution de la production.21
90. Il est difficile pour l’autorité chargée de l’enquête de juger que l’industrie nationale n’est pas
établie lorsque sa production a augmenté de manière stable et continue. Cependant, des
19
Par exemple, dansl’affaire Pressure Sensitive PVC Battery Covers from West Germany, USITC Pub.2265, Inv. Nº 731-TA452 (mars 1990) (prélim.), 13, la CCI a examiné la question de savoir si la production d’une industrie avait atteint un
niveau « se rapprochant raisonnablement du point mort ». Dansl’affaire Fresh and Chilled Atlantic Salmon from Norway,
USITC Pub. 2272, Inv. Nº 701-TA-302 et 731-TA-454 (avril 1990) (prélim.), 16, le critère adopté a été celui de l’atteinte par
la production d’un « point mort » raisonnable. Rien n’indique qu’une telle variation terminologique présente une
quelconque différence significative en pratique. En ce qui concerne la proposition selon laquelle la production n’est pas
stabilisée tant que l’industrie n’a pas atteint le point mort, Cf : Certain DriedSaltedCodfishfrom Canada (final) ;
BenzylParabenfromJapan(final) . Eu égard à la proposition selon laquelle la production est stabilisée lorsque l’industrie a
atteint le point mort, voir : Certain All-Terrain VehiclesfromJapan; Fresh and Chilled Atlantic Salmon fromNorway (final).
20
Korea - Anti-Dumping Duties On Imports Of Polyacetal Resins From The United States. Rapport du panel (ADP/92, et
Corr.1*) du 2 avril 1993, 297.
21
Cf. Certain Dried Salted Codfish from Canada (final) etBenzyl Paraben from Japan (final).
AD.4.13.UE/TUR
Non confidentiel
13
changements brusques des niveaux de production seront révélateurs du fait que l’industrie n’est pas
encore établie, ce qui est le cas de MAGHREB STEEL.
91. Effectivement, la production de MAGHREB STEEL en LAC a été irrégulière depuis la mise en
service des usines de production. Le tableau suivant met en évidence que les quantités produites
mois après mois présentent des fluctuations importantes, avec des réductions parfois de plus de
60%, voire même une interruption totale20 mois après le lancement de la production (en février
2012).
Tableau n°3 : Production mensuelle de MAGHREB STEEL en LAC
entre 2010 et 2012 (en milliers de tonnes)
(en indice ; base = 100)
2010
2011
2012
Janvier Février Mars Avril Mai Juin Juillet Août Septembre Octobre Novembre Décembre
_
_
_
_
_
100
119 131
144
169
206
206
256
150 225 219 219 150
206 219
275
131
256
288
231
0 200 213 194 181
88 131
150
200
175
150
Source: Données de MAGHREB STEEL
92. Sur la base de ce qui précède, le MDCCEestime qu’il est approprié de qualifier MAGHREB STEEL
comme « industrie non encore établie » et par conséquence d’aborder le dommage subi sous l’angle
de retard important dans la création d’une branche de production nationale.
5. 2ANALYSE DU DOMMAGE
93. En respect des dispositions de l’article 13 de la loi 15-09 disposant que :
«La détermination de l’existence d’un dommage se fonde sur les éléments de preuve
ressortant d’un examen objectif :
1) du volume des importations du produit considéré durant une période déterminée ;
2) de l’effet de ces importations sur les prix des produits nationaux similaires sur le marché
intérieur ;
3) de l’incidence de ces importations sur la branche de production nationale.
En plus, la détermination d’une menace de dommage ou du retard important dans la création d’une
branche de production nationale, visée à l’article 5, ci-dessus, doit être fondée sur des faits et non sur
des allégations ou des conjectures ou de lointaines possibilités.»,
leMDCCE déterminera l’existence du dommageà partir de l’examen du volume des importations en
dumping du produit concerné en provenance de l’Union Européenne et de la Turquie, de l’effet de
ces importations sur les prix et de l’incidence de ces importations sur la situation économique de la
branche de production nationale.
5.2.1 VOLUME DES IMPORTATIONS FAISANT L’OBJET DU DUMPING
94. Conformément aux dispositions de l’article 16 du décret 2-12-645, qui énonce :
« L’autorité gouvernementale chargée du commerce extérieur examine s’il y a eu augmentation
notable du volume des importations faisant l’objet d’un dumping ou d’une subvention, soit en
absolueou par rapport à la production nationale ou à la consommation nationale du produit
similaire durant une période de 12 mois précédant immédiatement la date d’ouverture de
l’enquête et pour lesquels les données sont disponibles. »,
leMDCCE a procédé à l’analyse de l’évolution du volume des importations des tôles d’acier laminées
AD.4.13.UE/TUR
Non confidentiel
14
à chaudoriginaires de l’Union Européenne et de la Turquie à partir des données fournies par l’Office
des Changes marocain.L’analyse de cette évolution a été faite d’abord en absolu et ensuite par
rapport à la production et la consommation nationales.
5.2.1.1 EVOLUTION DU VOLUME DES IMPORTATIONS EN ABSOLU
95. Le tableau n° 4, ci-dessous, retrace l’évolution des importations des tôles d’acier laminées à
chaud au cours de la période 2009-2012.
96. Avant d’examiner cette évolution, il est opportun de soulever que le rapport d’ouverture indique
que : « les importations en dumping, par leurs prix anormalement bas et donc très compétitifs, se sont
accaparées une part substantielle des importations au détriment des autres origines. Leur part dans
les importations a grimpé de 60% en 2009 et 92% au 1er semestre 2012. »22
97. Les exportateurs ont mis en cause ces affirmations dans leurs allégations en apportant des
chiffres contradictoires. Alors que CIB a indiqué que « le volume des importations en dumping a
diminué entre 2010 et 2011 et est resté stable entre 2011 et le premier semestre 2012 »23. De
mêmeselon ARCELORMITTAL, « les importations ont augmenté de façon très légère entre 2010 et
2011 et qu’ils ont diminué en 2012 »24.
98. Les chiffres apportés par les exportateurs indiquent par conséquent que les importations en
provenance des pays suspects de dumping ont augmenté ou diminué légèrement entre les années
2010 et 2012. Or, le principe devant être appliqué au dommage dans le cadre de la présente
procédure étant le retard important, le maintien, voire une certaine amélioration des importations
en provenance desdits pays vers le Maroc, en dépit de la mise en service dans ce dernier pays d’une
usine disposant d’une capacité de production de 1 500 000 tonnes des produits considérés, s’avère
particulièrement inquiétant.
99. Aussi, la ligne de laminage à chaud de bobines de MAGHREB STEEL a été mise en service en juin
2010. Subséquemment à la mise en service, et alors que les importations devaient naturellement
baisser, lesdites importations en provenance des pays objets de la requête ont continué à
augmenter, tel que le montre le tableau ci-après. Bien plus, tel qu’il a été évoqué dans le Rapport
d’Ouverture, les importations des pays suspectés de dumping sont venues à bout des autres
importations et continuent à dominer le marché marocain.
100. De même, les allégations présentées par l’exportateur ARCELORMITTAL eu égard à la
considérable augmentation de la part de marché de MAGHREB STEEL entre 2010 et 2011 sont
contestables. En effet, lesdites allégations ne prennent pas en considération que MAGHREB STEEL n’a
vendu que les produits qu’elle a fabriqué qu’à partir de l’année 2010. Avant cela, sa part de marché
des tôles laminées à chaud était nulle. Il est donc tout à fait naturel que sa part de marché ait
augmenté en 2011.
22
Cf. BMT Commodity Corp. c/ United States, 11 Ct. Int’l Trade 524, 525-26 (1987), confirmée par, 852 F.2d 1285 (Fed. Cir.
1988), rejet de la certification, 489 U.S. 1012 (1989).
23
« Commentaires présentés par le CIB (Association Turque des exportateurs de produits en acier) sur le rapport
d’ouverture et l’avis public relatifs à l’enquête antidumping sur les importations de tôles d’acier laminées à chaud
originaires ou exportées des pays de l’Union européenne et de la Turquie », présentés le 22 mars 2013.
24
Cf. Commentaires au Rapport d’ouverture présentés par ARCELOR MITTAL FLAT CARBON EUROPE du 5 avril 2013.
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Non confidentiel
15
Tableau n°4 : Volume (en tonnes) des importations de tôles d’acier laminées à chaud
originaires de l’Union Européenne et de la Turquie au cours de la période 2009 à 2012
Pays
Pays bas
Italie
France
Espagne
Autres pays de l'Union
européenne
Turquie
Total pays suspects de
dumping
Total pays autres que ceux
suspects de dumping
Total des importations
2009
2010
2011
2012
Quantité (T) Part (%) Quantité (T) Part (%) Quantité (T) Part (%) Quantité (T) Part (%)
62 279
14
21 838
7
60 725
27
36 933
22
21 926
5
10 852
3
17 918
8
34 320
20
23 784
6
30 563
9
19 418
9
34 591
21
63 763
15
105 235
32
48 907
22
19 919
12
19 409
14 759
5
3
6 818
11 775
2
4
3 765
54 133
2
24
7 554
29 028
4
17
205 920
48
187 081
56
204 866
91
162 345
96
224 477
430 397
52
100
144 401
331 482
44
100
19 482
224 348
9
100
6 261
168 606
4
100
Source: Données de l'Office des Changes
101. D’après les statistiques d’importation dont dispose le MDCCE, depuis l’année 2009, la grande
part des importations marocaines de tôles d’acier laminées à chaud sont originaires de l’Union
Européenne et de la Turquie.
102. Même si leur volume a oscillé entre 2009 et 2012, la part de ces importations originaires de
l’Union Européenne et de la Turquie dans le total des importations marocaines en tôles d’acier
laminées à chaud est en augmentation durant cette période où elle se situait à 48% en 2009 pour
atteindre les 96% en 2012.
5.2.1.2 EVOLUTION DES IMPORTATIONS PAR RAPPORT A LA PRODUCTION ET A LA CONSOMMATION NATIONALE
103. La consommation nationale a été déterminée sur la base du volume de la production nationale
totale, c’est-à-dire celui de l’unique producteur national MAGHREB STEEL, majoré des importations
totales et minoré des exportations tout en incluant la variation des stocks. Le tableau ci-dessous
présente l’ensemble des données relatives à l’évolution des importations par rapport à la production
nationale et à la consommation.
Tableau n°5 : Part des importations de tôles d’acier laminées à chaud originaires de l’Union
Européenne et de la Turquie dans la production et la consommation nationales entre 2010 à 2012
Importations (T)
Production nationale(en indice 2010=100)
Part des importations dans la production nationale (en indice 2010=
100)
Consommation nationale globale (en indice 2010= 100)
Part des importations dans la consommation nationale globale
(en indice 2010= 100)
Consommation nationale hors la consommation interne de
Maghreb Steel *(en indice 2010= 100)
Part des importations dans la consommation nationale hors la
consommation interne de Maghreb Steel (en indice 2010= 100)
2010
187 081
100
2011
204 866
240,93
2012
162 345
199,22
100
45,45
43,56
100
126,94
101,49
100
86,27
85,50
171
164
98,82
81,62
100
100
* une partie de la production totale est destinée à la consommation interne de l’entreprise utilisée dans la production des tôles d’acier laminées à froid, des tôles
galvanisées et prélaquées.
Source : Données de l'Office des changes et de MAGHREB STEEL
AD.4.13.UE/TUR
Non confidentiel
16
104. D’après les données dont a disposé le MDCCE, même si la part des importations dans la
production nationalea baissé entre 2010 et 2012, elle reste toujours non négligeable.
105. Pour ce qui est de la part des importations dans la consommation nationale, il est à considérer
qu’une partie de la production est destinée à la consommation interne de l’entreprise. Pour cette
raison le MDCCE a jugé approprié de déduire cette partie de la production dans le calcul de la
consommation nationale afin de se baser sur une consommation réelle hors la consommation interne
de MAGHREB STEEL. Ainsi, la part obtenue des importations dans la consommation nationale est
depuis 2010 à des niveaux considérables. En 2012, ces importations représentent plus de la moitié de
la consommation nationale, soit 57,34%.
5.2.2 EFFET
DES IMPORTATIONS EN DUMPING SUR LES PRIX DES TOLES D’ACIER LAMINEES A CHAUD FABRIQUEES
LOCALEMENT
106. Conformément aux dispositions de l’article 17 du décret 2-12-645, qui prévoit :
« En application de l’alinéa 2 de l’article 13 de la loi n°15-09 susvisée, l’autorité gouvernementale
chargée du commerce extérieur examine s’il y eu a sous-cotation notable du prix des importations
du produit considéré par rapport au prix du produit national similaire ou si ces importations ont
pour effet de déprimer les prix dans une mesure notable ou d’empêcher, dans une mesure
notable, des hausses de prix qui, sans ces importations, se seraient produites. »,
107. Pour le calcul de la sous cotation des prix, le MDCCE a procédé par la comparaison du prix de vente
moyen des tôles en acier laminées à chaud objets de l’enquête importées par les importateurs ayant
collaboré à l’enquête et de celles fabriquées par MAGHREB STEEL.
108. Ces prix ont été considérés au stade sortie usine pour MAGHREB STEEL et sortie entrepôt pour les
importateurs.
109. En effet à partir des données de 2012 des importateurs ayant collaboré à l’enquête, le MDCCE a
procédé au calcul des prix de ventes moyens pondérés des tôles d’aciers laminées en les distinguant
par exportateur fournisseur du produit. Ces prix ont été comparés au prix unitaire moyen de vente de
MAGHREB STEEL des tôles d’acier laminées à chaud afin d’obtenir une marge de sous cotation par
exportateur. Il est à préciser que, vu la situation de vente à perte de MAGHREB STEEL au cours de
l’année 2012, le prix de vente moyen de MAGHREB STEEL utilisé dans le calcul de la sous cotation est
établi sur la base de son coût de production moyen annuel majoré d’une marge bénéficiaire
raisonnable.
Tableau n°6 : Calcul de la sous cotation des prix pour l’année 2012
Marge de sous cotation
ARCELOR MITTAL
29,12%
STEEL LINK
29,87%
ERDEMIR
24,82%
COLAKOGLU
30,89%
Source : Données de MAGHREB STEEL et des importateurs ayant collaboré à l’enquête
110. Les marges de sous cotation, ainsi établies et variant entre 24% et 30%, traduisent le fait que les
prix de vente des tôles importées présentent en moyenne une différence importante comparativement
aux prix de vente de MAGHREB STEEL. Par conséquent et vu que la commercialisation des tôles se fait à
des quantités importantes et des montants non négligeables, les acheteurs et utilisateurs des tôles
AD.4.13.UE/TUR
Non confidentiel
17
laminées à chaud s’orientent naturellement vers celles importées au lieu de celles fabriquées
localement.
5.2.3 EFFET DES IMPORTATIONS EN DUMPING SUR LA SITUATION DE LA BRANCHE DE PRODUCTION NATIONALE DES TOLES
D’ACIER LAMINEES A CHAUD
111. L’article 18 du décret 2-12-645 prévoit que :
« En application de l’alinéa 3 de l’article 13 de la loi n°15-09, l’examen de l’incidence des
importations du produit considéré sur la branche de production nationale, comporte une
évaluation de tous les facteurs et indices économiques pertinents qui influent sur la situation
de cette branche, notamment :
a) la diminution effective et potentielle des ventes, des bénéfices, de la production, de
la part du marché, de la productivité, du retour sur investissement, de l’utilisation
des capacités de production ;
b) l’influence effective ou potentielle sur les prix intérieurs ;
c) l’importance de la marge de dumping ; et
d) les effets négatifs, effectifs ou potentiels sur, le flux de liquidités, les stocks, l’emploi,
les salaires, la croissance, la capacité de financement et de réinvestissement. »
112. Ainsi, en se basant sur les données collectées auprès de MAGHREB STEEL, le MDCCE a examiné
les indicateurs économiques influant la situation de la branche de production nationale.
113. Cependant, dans sa démarche, et en raison du type de dommage plaidé, le MDCCE s’est inspiré
de la doctrine la plus autorisée qui indique qu’aux fins de détermination de l’existence d’un retard
important au sens de l’article 3 de l’Accord Antidumping, « L’actuelle législation ne requiert pas que
des importations en dumping aient assurément empêché une industrie de s’établir. Même lorsque
l’industrie nationale ne se serait pas établie en l’absence d’importations réalisées à un prix inférieur à
leur juste valeur, s’il apparaît que l’industrie n’a pas pu atteindre le niveau projeté et que son
établissement définitif a été retardé en raison de l’existence d’importations objet de dumping,
l’existence du retard important se trouve suffisamment rapportée »25.
114. Il en ressort que si dans le cadre d’une enquête portant sur un dommage important, la pratique
internationale observe si l’existence d’une croissance saine de l’industrie ressort objectivement de
telles informations, en revanche dans le cadre d’une affaire portant sur un retard important, de telles
informations feraient l’objet d’une comparaison avec le niveau de résultats pouvant raisonnablement
être attendu. En effet, dans ce dernier cas, les résultats d’une nouvelle industrie ne peuvent atteindre
un degré similaire à celui d’une industrie arrivée à son plein développement en raison des coûts de
démarrage ou autres facteurs.
115.
Suivant
la
pratiqueaméricaineeteuégardà
la
déterminationdu
niveaudes
résultatspouvantraisonnablementêtreattendu:« The market and feasibility studies prepared by
petitioner and [the independent institution] at the inception of its business operations provide a
benchmark of expected performance against which to measure the actual performance of
petitioner ».26
116. Ainsi, le MDCCE a jugé convenable, dans la détermination de l’existence d’un retard important,
d’étudier d’une part,le plan d’affaires élaboré par MAGHREB STEEL à la veille de la création de la
25
Cf. DONG WOO S., "Material retardation standard in the US antidumping law", Law and policy in international business,
Harvard lawschool, 1992.
26
Cf. BMT Commodity Corp. c/ United States, 11 Ct. Int’l Trade 524, 525-26 (1987), confirmée par, 852 F.2d 1285 (Fed. Cir.
1988), rejet de la certification, 489 U.S. 1012 (1989).
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Non confidentiel
18
nouvelle branche d’activité et d’autre part, les performances réalisées par la suite et ce dans le but de
les comparer et d’analyser les écarts qui apparaissent.
117. Par ailleurs, l’un des arguments de la Commission européenne et des exportateurs afin de
contester le Rapport d’Ouverture est le prétendu défaut de solidité et de réalisme du plan d’affaires
élaboré par MAGHREB STEEL en vue de développer sa nouvelle ligne d’activités. Ainsi, la Commission
Européenneaindiquéque:« it seems that the estimates in this study were simply not realistic »27.
Quant à ARCELOR MITTAL, elle affirme que : « Ce business plan consacré à la possibilité d’étendre sa
production au laminé à chaud faisait état de prévisions manifestement irréalistes par rapport aux
réalités du marché »28. Enfin, le CIB a allégué que : « dans ce contexte économique défavorable, il est
normal que les réalisations du plaignant aient été en deçà des prévisions fixées dans le plan d’affaires
en 2007 »29.
118. Cependant, aux fins de la préparation de son plan d’affaires, MAGHREB STEEL s’est appuyée sur
des experts du marché du laminage à chaud. En effet, le business plan de MAGHREB STEEL sur
l’investissement dans la création d’une nouvelle branche de production de tôles d’acier laminées à
chaud a pris compte d’une étude de profitabilité préparé par MCLELLAN ET PARTNERS LTD qui est
une société de consultance indépendante et multi-disciplinaire fournissant des services spécialisés à
travers le monde.30
119. MCLELLAN a préparé un rapport de préfaisabilité pour le compte de MAGHREB STEEL afin de
déterminer si la création d’une nouvelle branche de production de tôles d’acier laminées à chaud
serait faisable. Ce projet prévoyait la construction d’un laminoir de bobines de tôle laminées à chaud
(BTC). Ainsi, deux spécialistes McLellan ont visité MAGHREB STEEL afin de réaliser diverses études de
faisabilité du projet de MAGHREB STEEL.
120. Sur la base de son diagnostic, McLellan a conclu qu’il n’y a pas d’obstacles techniques ou
d’objections à la mise en œuvre du projet et que l’équipement de laminage proposé par MAGHREB
STEEL et ses auxiliaires sont technologiquement bien établis et éprouvés. Egalement, le rapport a
conclu que le projet de MAGHREB STEEL jouit de bonnes perspectives commerciales parce qu’il
bénéficie d’un marché garanti pour presque la moitié de sa production et ne dépend pas de grands
volumes d’exportations.
121. De plus, MAGHREB STEEL est la première intéressée par l’élaboration d’un plan d’affaires
reflétant la réalité du marché. Préalablement à la réalisation de deux investissements aussi
importants, l’un de 1,6 milliard de DH en vue du développement de l’activité du laminoir à chaud de
bobines (LAC) et l’autre, de 1,2 milliard de DH pour le développement de l’activité du laminoir à
chaud de tôles fortes (TF), l’entreprise s’est assurée de la viabilité de l’activité au moyen de
l’élaboration dudit plan, fondé sur des paramètres économiques objectifs et communément
acceptés.
122. Sur la base de ce qui précède, il apparaît clair au MDCCEque les allégations des exportateurs et
de la Commission Européenne concernant le plan d’affaires et les conséquences de la crise
internationale à son égard sont dépourvues de tout fondement.
123. Ceci dit, en ce qui concerne la méthodologie utilisée par les autorités antidumping en vue
d’analyser le dommage prenant forme de « retard important », l’article 3 de l’Accord Antidumping
27
Cf. Commentaires présentés le 19 février 2013 par la Direction générale du commerce de la Commission européenne au
Rapport d’Ouverture.
28
Cf.Commentaires au Rapport d’ouverture présentés par ARCELOR MITTAL FLAT CARBON EUROPE du 5 avril 2013.
29
Cf. « Commentaires présentés par le CIB (Association Turque des exportateurs de produits en acier) sur le rapport
d’ouverture et l’avis public relatifs à l’enquête antidumping sur les importations de tôles d’acier laminées à chaud
originaires ou exportées des pays de l’Union européenne et de la Turquie », présentés le 22 mars 2013.
30
Toute l’information sur la compagnie est disponible sur le site web : http://www.mclellan.co.uk/
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Non confidentiel
19
énonce l’ensemble des facteurs habituellement utilisés afin de déterminer si une industrie a subi un
dommage. En application dudit article, la détermination du dommage doit être fondée sur des
éléments de preuve positifs et un examen objectif31.
124. Les critères à analyser, cités dans ledit article 3, sont utilisés de manière classique dans l’analyse
du « dommage important ». Néanmoins, l’Accord Antidumping n’énonce pas de critères spécifiques
pour l’analyse du « retard important ».
125. En effet, bien que le cycle de l’Uruguay des négociations de l’OMC a visé une série
supplémentaire de facteurs économiques devant être spécifiquement et particulièrement appréciés
en cas de « menace d’un dommage important », s’agissant de l’application du principe du « retard
important », il n’existe pas de facteurs distincts concernant cette question.
126. D’un autre côté, il pourrait être allégué, sur le fondement de la note de bas de page n° 9 de
l’article 3 de l’Accord Antidumping, que les autorités chargées de l’enquête doivent par conséquent
se fonder sur les facteurs énoncés aux articles 3.1 à 3.3. Cependant, les deux facteurs figurant à
l’Article 3.1, à savoir, le volume des importations faisant l’objet d’un dumping et les conséquences
des importations sur les produits nationaux, ne sont pas correctement adaptés à toutes les situations
de retard important. Des informations fiables concernant ces facteurs ne sont disponibles que dans
les cas où l’industrie nationale ayant prétendument subi un dommage a généré une production
durant un laps de temps significatif et qu’elle est parvenue à stabiliser ses opérations de production.
127. En l’espèce, les commentaires et allégations présentés par les exportateurs se fondent sur une
analyse classique du « dommage important » sans prendre en considération la spécificité de la
présente affaire. Ainsi, alors que leur examen se limite à démontrer que les importations n’ont pas
causé de dommage important à l’industrie marocaine (ce qui est réfuté), cette analyse n’examine pas
le « retard dans l’établissement »dont a souffert ladite industrie.
128. Il ressort également de la pratique récurrente des autorités américaines que les facteurs
pertinents aux fins d’une analyse du lien de causalité, tels que le volume et la pénétration du marché
par les importations, peuvent s’avérer trompeurs lorsqu’il s’agit de considérer les hypothèses de
retard important32. En effet, la courte période d’activité opérationnelle de l’industrie génère des
informations dont il est peu probable qu’elles se révèlent exactes ou décrivent suffisamment la
situation de l’industrie en cause.
129. Afin de surmonter cet inconvénient, les autorités antidumping américaines, dans une affaire
concernant une industrie naissante, ont obtenu des informations telles que les ventes réalisées sur le
marché national, les ventes perdues, la capacité d’utilisation, les niveaux d’emploi de l’industrie
nationale ayant tout juste débuté la production d’un produit similaire33. Ces informations ont ensuite
été comparées avec les chiffres proposés dans l’étude de faisabilité élaborée par l’industrie à l’origine
du projet avant le début de la production. De même, dans une autre affaire concernant une industrie
naissante, la CCI a examiné la question de savoir si les résultats de l’industrie reflétaient des
conditions normales de démarrage et a pris en considération des indicateurs économiques tels que le
volume total des marchandises, les stocks de marchandises et la performance financière.
130. Enfin, et avant de passer à l’analyse de facteurs de dommage relatifs au cas présent, il est à
rappeler qu’au vu des conclusions du Rapport d’Ouverture, les exportateurs allèguent que dans
l’hypothèse où le Département du commerce extérieur considère que la branche de production
31
Cf. article 3 de l’Accord Antidumping.
Cf. Certain Copier Toner from Japan, USITC, Pub. Nº 1960, Inv. Nº 731-TA-373 (mars 1987).
33
Cf. BMT Commodity Corp. c/ United States, 11 Ct. Int’l Trade 524, 525-26 (1987), confirmée par, 852 F.2d 1285 (Fed. Cir.
1988), rejet de la certification, 489 U.S. 1012 (1989).
32
AD.4.13.UE/TUR
Non confidentiel
20
nationale a subi un retard important dans sa création, « l’ensemble des éléments de preuve
mentionné dans le Rapport d’ouverture ne permet pas de démontrer l’existence d’un dommage.»
131. Cependant, notons que, lorsqu’elles apprécient le retard important, les autorités américaines
examinent l’ensemble des facteurs économiques pertinents eu égard aux conditions de concurrence
uniques auxquelles se trouve soumise l’industrie nationale. Ces facteurs, proposés par la CCI,
incluent : a) la production nationale ; b) les ventes ; c) les capacités d’utilisation ; d) les stocks ; e) les
conditions financières ; f) l’emploi ; et, g) les résultats projetés comparés aux résultats obtenus.
132. En outre, précisément en raison de la nature complexe de cette détermination du dommage, les
autorités chargées de l’enquête doivent bien évidemment bénéficier d’un certain pouvoir
discrétionnaire eu égard aux conditions énoncées à l’Article 3.1 de l’Accord Antidumping de l’OMCet
consistant, d’une part, en des éléments de preuve positifs et, d’autre part, en un « examen objectif ».
133. Ceci étant, le MDCCE estime qu’il est approprié, pour déterminer l’existence d’un dommage
important dans le contexte d’un retard important dans la création d’une branche de production
nationale, d’analyser les facteurs de dommage visés à l’article 18 du décret 2-12-645 selon la
démarche de comparaison des réalisations effectives avec les résultats raisonnablement escomptés
tel que fixés dans le plan d’affaires de MAGHREB STEEL.
5.2.3.1 PRODUCTION DE TOLES D’ACIER LAMINEES A CHAUD
Tableau n°7 : Volume de production de MAGHREB STEEL entre 2010 et 2012
(en indice ; base=100)
Production (tonne)
Année 2010
Année 2011
Année 2012
Prévisions Réalisations Ecart% Prévisions Réalisations Ecart% Prévisions Réalisations Ecart%
100
39
-61
154
95
-39
184
78
-58
Source: données collectées auprès de Maghreb Steel
134. Selon les données de MAGHREB STEEL, le niveau de production réalisé est resté en-deçà de ses
prévisions entre 2010 et 2012. Les écarts subis durant cet intervalle sont, respectivement, de l’ordre
de -61%, -39% et -58%.L’entreprise déclare avoir été contrainte, entre 2010 à 2012, de limiter sa
production à des niveaux inférieurs à sa capacité réelle de production qui est de l’ordre de 1 500 000
de tonnes annuelles. Elleimpute cette inutilisation de la capacité de production aux importations en
dumping qui submergent le marché local.
135. De plus, il est à préciser qu’une partie de cette production est destinée à la consommation
interne de l’entreprise utilisée dans la production des tôles d’acier laminées à froid, des tôles
galvanisées et prélaquées.
136. Certains commentairesformulés dans le cadre de cetteenquête, notamment ceux émanant du
CIB, évoquent l’augmentation de la production réalisée par MAGHREB STEEL afin de démontrer
l’absence de dommage. Or, dès lors qu’il s’agit d’une entreprise créée en 2010, l’augmentation de la
production n’est pas, en soi, à même de démontrer l’absence de dommage pour l’entreprise. En
effet, dans les hypothèses de retard matériel, le test opportun permettant de déterminer l’existence
d’un dommage consiste à comparer les résultats de production réels avec ceux qui auraient pu
raisonnablement être obtenus en l’absence d’importations en dumping.
5.2.3.2 CAPACITE DE PRODUCTION ET UTILISATION DES CAPACITES
137. L’un des indicateurs les plus pertinents afin de déterminer l’existence d’un retard dans
l’établissement de l’industrie nationale est celui du taux d’utilisation de la capacité. En effet, le fait
qu’un taux d’utilisation de la capacité installée soit très inférieur à celui pouvant être considéré
comme raisonnable dans le cadre du démarrage d’une activité nouvelle met en évidence le retard
AD.4.13.UE/TUR
Non confidentiel
21
important dudit taux.
138. À cet égard, les commentaires des exportateurs sont les suivants : « le plaignant, qui n’était
auparavant pas actif sur le marché des produits en acier laminés à chaud, a vu les choses en grand en
décidant de construire un complexe d’une capacité de production de 1 500 000 tonnes. […] La décision
de construire deux laminoirs à chaud d’une capacité totale de 1 500 000 tonnes apparaît totalement
disproportionné »34. Néanmoins, les perspectives de MAGHREB STEEL pour les années 2011 et 2012
étaient beaucoup plus prudentes et ne prévoyaient qu’un taux d’utilisation de la capacité totale
oscillant entre 53% et 55% pour les LAC et entre 30% et 52% pour les TF.
139. Or, ainsi que cela peut être apprécié dans le tableau ci-après, les taux d’utilisation réels de la
capacité installée ont été considérablement plus faibles que ceux prévus dans le plan d’affaires. Ceci
met de nouveau en exergue que l’établissement de l’industrie marocaine souffre d’un retard
important.
Tableau n°8: Capacité de production et tauxd’utilisation de la capacité de production de MAGHREB
STEEL entre 2010 et 2012
Source: données collectées auprès de Maghreb Steel
140.En effet, Pour l’activité LAC, la capacité de production s’élève à 1 000 000 de tonnes. Cependant
depuis 2010, MAGHREB STEEL est incapable d’exécuter ses prévisions en utilisant sa capacité de
production tel que prévu dans le plan d’affaires initial. Ainsi, elle s’est vue écarté de ses objectifs,
pour l’activité LAC, de 32% en 2010, puis de 23% en 2011 et enfin de 44% en 2012.
141. Pour l’activité TF, les écarts ont été beaucoup plus importants.En 2011, l’écart par rapport aux
prévisions s’est situé à 100% et en 2012 à 83%.
142. Ces écarts dans l’utilisation de la capacité de production reflètent parfaitement ceux enregistrés
dans la production.
143. Il est à noter que ce niveau de capacité ne reflète pas simplement les conditions de démarrage
d’une activité auxquelles une entreprise doit faire face lorsqu’elle entre sur un marché difficile. Les
chiffres obtenus sont bien pires que ceux auxquels l’on pouvait raisonnablement s’attendre. Il
convient par ailleurs de noter que le taux d’utilisation relativement plus élevé en 2011 a généré un
stock important à la fin 2011 qui n’a pu être écoulé en raison des importations présumées objet de
dumping.
34
Cf. « Commentaires présentés par le CIB (Association Turque des exportateurs de produits en acier) sur le rapport
d’ouverture et l’avis public relatifs à l’enquête antidumping sur les importations de tôles d’acier laminées à chaud
originaires ou exportées des pays de l’Union européenne et de la Turquie », présentés le 22 mars 2013.
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22
5.2.3.3VOLUME DES VENTES ET PART DE MARCHE
144. Les exportateurs, dans leurs commentaires au Rapport d’Ouverture, ont signalé que leurs
exportations vers le Maroc des produits objets de l’enquête ne peuvent, en aucun cas, avoir causé un
dommage à MAGHREB STEEL et allèguent que leurs ventes de LAC et de TF ont augmenté
sensiblement depuis le début de la production en juin 2010 et mai 2012, respectivement. Néanmoins,
du fait qu’il est procédé en l’espèce à une analyse du dommage dans le contexte du retard important,
il s’avère plus approprié de comparer le niveau réel de ventes obtenu par MAGHREB STEEL avec celui
qu’elle aurait raisonnablement dû atteindre dans des conditions normales de concurrence.
Tableau n°9 : Volume des ventes de tôles d’acier laminées à chaud de MAGHREB STEEL
entre 2009 et 2012
Source: Données collectées auprès de Maghreb Steel
145. A cet égard, les prévisions des ventes, élaborées dans le business plan de MAGHREB STEEL,
confrontées aux réalisations de l’entreprise font apparaître de très nets écarts entre 2010 et 2012.
MAGHREB STEEL n’a pas pu atteindre le volume de ventes prévu qu’elle estime avoir fixé sur des
bases réalistes. L’entreprise s’est donc écartée de ses objectifs de 74% en 2010, puis de 71% en 2011
et de 67% en 2012.
146. Cependant, il est à distinguer que les ventes domestiques ont enregistré des écarts plus
importants que ceux des ventes à l’export. A titre illustratif, les ventes domestiques de LAC ont connu
des écarts en 2010, 2011 et 2012 respectivement de l’ordre de -81%, -69% et -59%. Tandis que les
ventes à l’export ont largement dépassé les niveaux prévus de, respectivement pour les mêmes
années, 477%, 732% et 724%, marquant ainsi la capacité de MAGHREB STEEL à surpasser ses objectifs
initiaux en profitants de ses avantages comparatifs.
147. Aussi, ces performances à l’export montrent que sur d’autres marchés, MAGHREB STEEL est
capable de mieux écouler sa production contrairement à ce qu’elle subit sur son marché local en
raison de la présence d’importations en dumping.
Tableau n°10 : Part de marché de MAGHREB STEEL entre 2010 et 2012
Source: données collectées auprès de Maghreb Steel
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23
148. En ce qui concerne la part de marché occupée par MAGHREB STEEL entre 2010 et 2012, les
écarts sont importants au point de remettre en cause la viabilité de la nouvelle activité. En 2010, la
part de marché de l’entreprise pour les LAC s’est éloignée des prévisions de 77%. En 2012,
l’entreprise, contrairement à ce qu’elle a prévu d’atteindre comme parts des marchés LAC et TF, ses
réalisations sont restées de 41% inférieures aux prévisions.
149. MAGHREB STEEL attribue ses contreperformances et cette incapacité de s’affirmer sur le marché
local à la présence des importations à des prix de dumping.
5.2.3.4 EMPLOI ET PRODUCTIVITE
Tableau n°11 : Effectif de MAGHREB STEEL entre 2010 et 2012
Source: données collectées auprès de Maghreb Steel
150. Ses chiffres à l’appui, MAGHREB STEEL stipule que dans le cas où le maintien forcé d’un faible
niveau d’activité continuerait à s’imposer, un ajustement des charges fixes sera inévitable.
L’entreprise considère qu’avec le niveau de production actuel, au moins 400 personnes seraient
sérieusement menacés par un licenciement économique.
Tableau n°12 : Productivité de MAGHREB STEEL entre 2010 et 2012
Source: données collectées auprès de Maghreb Steel
151. Comparativement aux prévisions retenues, les réalisations de Maghreb Steel affichent, depuis le
démarrage de la nouvelle activité en 2010, un net recul de sa productivité mesurée en production
annuelle par personne occupée. En 2012, cet écart est arrivé à -59% pour l’activité des LAC et à -90%
pour l’activité des TF.
152. L’entreprise accuse les importations en dumping de ce décalage important de la productivité
réalisée. Elle a ainsi été obligée de restreindre sa production vue son incapacité de l’écouler sur un
marché dominé par ces importations.
5.2.3.5 STOCKS
153. En raison de la non-réalisation de ses prévisions de ventes, les stocks de MAGHREB STEEL en LAC
ont eu une tendance à augmenter entre 2009 et 2011, chose que l’entreprise n’a pas
prévue.MAGHREB STEEL, dans ses prévisions pour la nouvelle activité, ne prévoyait pas la
constitution de stocks considérables et générateurs de coûts tels qu’ils se sont accumulés en fin 2010
et 2011 pour atteindre, respectivement, 48174 tonnes et 95332 tonnes, soit une variation de 98%.
AD.4.13.UE/TUR
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24
Tableau n°13 : Stocks de tôles d’acier laminées à chaud
fabriquées par MAGHREB STEEL entre 2010 et 2012
(en indice; base=100)
Stock de LAC
Stock de TF
Au 31/12/2009
Volume
(tonne)
100
_
Au 31/12/2010
Volume
Variation %
(tonne)
107
7
_
_
Au 31/12/2011
Volume
Variation %
(tonne)
211
98
_
_
Au 31/12/2012
Volume
Variation %
(tonne)
101
-52
21
_
Source: données collectées auprès de Maghreb Steel
154. Comme le montrent les chiffres du tableau ci-dessus, MAGHREB STEEL a généré un stock cumulé
significatif d’invendus en 2011, date à laquelle ont débuté les importations présumées objet de
dumping. La baisse de la production de plus de 100 000 tonnes au cours de l’année 2012 a contribué
en partie à réduire ce stock disproportionné. Toutefois, à la fin de l’année 2012, il existait encore un
stock cumulé de plus de 55 000 tonnes.
155. Cet état d’augmentation disproportionnée du stock invendu au cours des premiers mois de
production est un autre aspect démontrant l’existence d’un retard important dans l’établissement
d’une industrie naissante.
156. Enfin, le volume considérable du stock invendu de MAGHREB STEEL met de nouveau en exergue
l’existence d’un retard important dans son établissement puisque, en l’absence d’importations à des
prix anormalement bas, MAGHREB STEEL aurait pu écouler une grande partie de ce stock cumulé.
5.2.3.6 RENTABILITE
157. Les données de MAGHREB STEEL affichent une nette détérioration de la rentabilité de ses
activités de production. Le résultat courant avant impôt des activités LAC et TF réalisé entre 2010 et
2012 est resté loin de ce qu’a prévu l’entreprise, l’écart négatif était de -166% en 2010 et a atteint les
-180% en 2012.
Tableau n°14 : Résultat courant avant impôt pour les activités LAC et TF
de MAGHREB STEEL entre 2010 et 2012
Source: données collectées auprès de MAGHREB STEEL
158. Un tel niveau de rentabilité s’accorde parfaitement avec la baisse du chiffre d’affaires et
l’augmentation des charges supportées par MAGHREB STEEL.
159. Par ailleurs, il est à souligner que non seulement ce niveau de rentabilité est manifestement
inférieur à celui qui aurait raisonnablement dû être obtenu dans des conditions normales de marché
– ce qui atteste d’un retard important dans l’établissement de l’entreprise –, mais menace en outre
l’ensemble de l’activité de MAGHREB STEEL.
5.2.3.7 IMPORTANCE DE LA MARGE DE DUMPING
160. Compte tenu du volume et des prix des importationsfaisant objet d’un dumping, l’incidence des
différentes marges réelles de dumping, qui sont elles aussi significatives, ne pourrait être considérée
comme négligeable.
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Non confidentiel
25
161. Comme établi, à titre provisoire, à la section 4.4 du présent rapport, la marge de dumping
pratiqué par les exportateurs est comprise entre 22,11 % et 60,42 %. Compte tenu des niveaux de ces
marges de dumping et du volume des exportations, le montant du dumping enregistré sur la période
de l’enquête s’élève à 204 Millions de dirhams, soit 28,27 % du chiffre d’affaires en tôles d’acier
laminées à chaud de MAGHREB STEEL sur le marché domestique pendant la période de l’enquête.
5.3. CONCLUSION SUR LA DETERMINATION DE L’EXISTENCE D’UN DOMMAGE IMPORTANT
162. L’examen et l’analyse des éléments de dommage permettent de dégager les résultats suivants :
-
-
Le volume des importations en tôles d’acier laminées à chaud originaires de l’Union
Européenne et de la Turquie a connu des fluctuations depuis 2009 et même si elles ont baissé
en 2012, leur part dans le total des importations et dans la consommation et la production
nationale reste bien importante ;
Ces importations ont un effet notable sur les prix des tôles d’acier laminées à chaud
fabriquées localement. Le MDCCE a relevé l’existence d’une sous cotation non négligeable ;
La branche de production nationale souffre d’un dommage important prenant forme d’un
retard important dans la création d’une branche de production nationale où ses performances
réalisées restent bien loin de ses prévisions raisonnablement préétablies.
163. Compte tenu de ce qui précède, le MDCCE conclut à titre provisoire que la branche de
production nationale des tôles d’acier laminées à chaud a subi un dommage important prenant
forme de retard important dans la création de branche de production nationale.
6. DETERMINATION DE L’EXISTENCE D’UN LIEN DE CAUSALITE ENTRE LES IMPORTATIONS EN DUMPING ET LE
DOMMAGE
164. Concernant la détermination de l’existence d’un lien de causalité, les dispositions de l’article 14
de la loi 15-09 énoncent que :
« La démonstration d’un lien de causalité entre les importations du produit considéré et le
dommage à la branche de production nationale, est établie en examinant tous les éléments de
preuve disponibles, notamment, les facteurs connus autres que les importations du produit
considéré qui, au même moment, sont susceptibles d’avoir causé un dommage à la branche de
production nationale. Le dommage causé par ces autres facteurs n’est pas imputé aux
importations du produit considéré. »
165. De même, l’article 22 du décret n° 2-12-645 précise que :
« les facteurs connus autres que les importations du produit considéré, prévus à l’article 14 de la
loi n°15-09 susvisée, comprennent entre autres :
a) la contraction de la demande ou les modifications de la configuration de la consommation ;
b) le volume et les prix des importations non vendues à des prix de dumping ou non
subventionnées ;
c) les pratiques commerciales restrictives des producteurs étrangers et nationaux ;
d) la concurrence entre les producteurs étrangers et nationaux et entre les producteurs
nationaux eux-mêmes ;
e)l’évolution des techniques liées à la production et à la commercialisation du produit
considéré au regard des techniques appliquées pour le produit national similaire.
f) les résultats à l’exportation de la branche de production nationale ;
g) la productivité de la branche de production nationale ; et
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Non confidentiel
26
h)les autres facteurs qu’une partie intéressée peut évoquer au cours de l’enquête comme étant
une cause du dommage ou de la menace de dommage. »
166. Ainsi, le MDCCE a procédé, en premier lieu, par examiner si les importations en dumping de
tôles d’acier laminées à chaud ont causé à l’industrie nationale le dommage important, tel qu’établi à
titre provisoire à la section 5 du présent rapport. En second lieu, les facteurs connus, autres que les
importations en dumping, ont également été examinés en vue de déterminer si ces facteurs
auraientcausé un dommage qui ne peut être attribué aux importations en dumping.
6.1 EFFET DES IMPORTATIONS EN DUMPING
167. L’enquête a montré que le volume des importations en dumping a fluctué entre 2009 et 2012.
Pourtant, la part de ces importations en dumping dans le total des importations de tôles d’aciers
laminées à chaud est resté importante depuis 2009 et jusqu’en 2012 où elle a atteint 96%.
168. Les importations en dumping occupent une part importante dans la consommation et la
production nationales. En effet la part des importations en dumping dans la consommation nationale
globale a été considérable entre 2010 et 2012 où elle a atteint 31,75%.
169. En outre, la part des importations en dumping dans la consommation nationale (hors
consommation interne de MAGREB STEEL) est restée non négligeable alors qu’elle devait normalement
considérablement baisser suite à la mise en service de la ligne de laminage à chaud de bobines du
producteur national MAGHREB STEEL. Ces importations en dumping sont venues à bout des autres
importations et continuent à dominer le marché marocain.
170. Comme il a été démontré précédemment, la présence des importations en dumping a empêché
MAGHREB STEEL de réaliser ses prévisions pour sa nouvelle activité. En effet, l’entreprise s’est vue
incapable d’écouler sa production sur son marché local dominé par les importations en dumping et par
conséquence, elle a dû limiter son volume de production en deçà de ses prévisions préétablies.
171. En réduisant sa production, MAGHREB STEEL n’a même pas pu atteindre son seuil de rentabilité,
chose qui a remis en cause la stabilité et le développement de sa nouvelle activité.
6.2 EFFET DES IMPORTATIONS EN PROVENANCE DES PAYS TIERS
172. Sur la base des statistiques de l’Office des Changes dont dispose le MDCCE, la part des
importations en provenance des pays tiers reste minime par rapport à celle des importations en
dumping.
173. De plus, cette part en baisse depuis 2009, où elle était de l’ordre de 52 %, n’atteignant en 2012
que les 4%.
174. A partir de ces constats, le MDCCE estime inapproprié d’imputer le dommage subi par la branche
de production nationale à ces importations en provenance des pays tiers.
6.3 EFFET DE LA CONTRACTION DE LA DEMANDE OU DES MODIFICATIONS DE LA CONFIGURATION DE LA CONSOMMATION
175. La demande, exprimée par la consommation nationale, avant d’enregistrer une baisse en 2012, a
augmenté entre 2010 et 2011. Seulement, MAGHREB STEEL n’a pas pu profiter de cette augmentation
que les importations en dumping en ont absorbé plus de 30%.
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27
Tableau n°15 : Part des importations de tôles d’acier laminées à chaud originaires de l’Union
Européenne et de la Turquie dans la production et la consommation nationales entre 2010 à 2012
Importations (T)
Production nationale(en indice 2010=100)
Part des importations dans la production nationale (en indice 2010=
100)
Consommation nationale globale (en indice 2010= 100)
Part des importations dans la consommation nationale globale
(en indice 2010= 100)
Consommation nationale hors la consommation interne de
Maghreb Steel *(en indice 2010= 100)
Part des importations dans la consommation nationale hors la
consommation interne de Maghreb Steel (en indice 2010= 100)
2010
187 081
100
2011
204 866
240,93
2012
162 345
199,22
100
45,45
43,56
100
126,94
101,49
100
86,27
85,50
171
164
98,82
81,62
100
100
* une partie de la production totale est destinée à la consommation interne de l’entreprise utilisée dans la production des tôles d’acier laminées à froid, des tôles
galvanisées et prélaquées.
Source : Données de l'Office des changes et de MAGHREB STEEL
176. Quel que soit le niveau de la demande, MAGHREB STEEL, en raison de la présence d’importations à
des prix de dumping, n’a pas été en mesure de s’accaparer une part assurant la viabilité et le
développement de son activité tel qu’il a été prévu dans son plan d’affaires.
177. Pour le MDCCE, il est difficile de corréler l’évolution de la demande avec le dommage subi par
MAGHREB STEEL du fait que la grande part de cette demande (hors consommation interne de
MAGHREB STEEL) est satisfaite par les importations en dumping, soit à un niveau de 57,34 % en 2012.
6.4 EFFET
DES PRATIQUES COMMERCIALES RESTRICTIVES DES PRODUCTEURS ETRANGERS ET NATIONAUX ET DE LA
CONCURRENCE ENTRE CES MEMES PRODUCTEURS
178. Au cours de ses travaux d’enquête, le MDCCE n’a pu relever aucun indice démontrant l’existence
de pratiques restrictives entre les producteurs étrangers et le producteur national, autre que les
exportations à des prix de dumping.
179. En outre, MAGHREB STEEL est l’unique producteur de tôles d’acier laminées à chaud au Maroc.
Par conséquent, il n’est pas question de dire que le dommage subi par l’entreprise découle de pratiques
commerciales restrictives entre producteurs nationaux.
6.5 EFFET DE L’EVOLUTION DES TECHNIQUES
180. Le producteurTATA STEEL considère que les limitations techniques inhérentes à la fabrication de
tôles d’acier laminées à chaud empêchent MAGHREB STEEL de fournir toutes les catégories de
produits. De ce fait, les consommateurs nationaux n’ont pas d’autre choix que de continuer de
dépendre des produits importés. De même, ce producteur affirme que de nombreux consommateurs
marocains, du fait qu’ils mettent en doute la qualité des produits de MAGHREB STEEL, préfèrent les
produits européens. Par conséquent, TATA STEEL estime qu’en tout état de cause, les importations des
tôles d’acier laminées à chaud ne constituent pas la cause du retard important dans la création de la
branche de production nationale.
181. MAGHREB STEEL est dotée d’une aciérie électrique et de deux laminoirs à chaud de références
reconnues et installés par SMS, un des leaders mondiaux du secteur sidérurgique. Aussi, l’enquête a
montré que les produits de MAGHREB STEEL sont conformes aux standards internationaux, la preuve
est que MAGHREB STEEL parvient bien à commercialiser ses produits sur le marché international et eu
égard à ses performances à l’export, MAGHREB STEEL semble s’en sortir mieux à l’exportation que sur
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Non confidentiel
28
son marché domestique.
182. De plus, la technologie utilisée par MAGHREB STEEL permet la production de la tôle aux normes de
qualité et standards internationaux.
183. Il en découle que le MDCCE juge approprié d’écarter l’éventualité où le dommage subi par
MAGHREB STEEL découlerait de l’évolution technique.
6.6 EFFET DES RESULTATS A L’EXPORTATION DE L’INDUSTRIE NATIONALE
Tableau n°16 : Volume des ventes de tôles d’acier laminées à chaud à l’export de MAGHREB STEEL
(en indice; base = 100)
ventes à l'export (T)
2009
100
2010
1 083
2011
3 905
2012
5 102
Source: Données de MAGHREB STEEL
184. D’après les données collectées auprès de MAGHREB STEEL, le MDCCE a noté que le volume des
ventes de l’entreprise à l’export est en forte augmentation depuis 2009.
185. De ce fait, le MDCCE a jugé inapproprié d’imputer le dommage subi par MAGHREB STEEL à ses
résultats à l’exportation. Au contraire, c’est plutôt ces résultats à l’export qui lui ont permis d’alléger le
dommage qu’elle a subi.
6.7 EFFET DE LA PRODUCTIVITE DE L’INDUSTRIE NATIONALE
186. La productivité de MAGHREB STEEL pour l’activité des tôles d’acier laminées à chaud a diminué
entre 2010 et 2012. Cependant, le MDCCE estime que cette contreperformance dans la productivité ne
peut être le résultat qu’une quelconque défaillance interne de l’entreprise.
187. En effet, à la veille du démarrage de sa nouvelle activité, MAGHREB STEEL, compte tenu de ses
moyens et potentiels, a prévu dans son plan d’affaire une productivité nettement plus importante que
celle réalisée, tel qu’il est reproduit au tableau n°12 ci-dessus.
188. Si MAGHREB STEEL s’est écartée de ses prévisions en matière de productivité, cela est
essentiellement dû à la baisse forcée de la production en raison de la présence dans le marché local des
importations en dumping, tel qu’il a été expliqué précédemment.
6.8 EFFET DES AUTRES FACTEURS QU’UNE PARTIE INTERESSEE PEUT EVOQUER AU COURS DE L’ENQUETE
189. En vue de remettre en cause le lien de causalité entre le dommage subi par la branche de
production nationale et les importations en dumping, la plupart des commentaires reçus par le MDCCE
font référence au caractère trop ambitieux du plan d’affaires.
190. D’après les producteurs européens et turcs ainsi que la Commission européenne, les objectifs fixés
par le plan d’affaires étaient trop optimistes, en particulier dans un contexte de crise internationale du
secteur de l’acier à partir de 2008 ayant provoqué une chute des prix. Selon les auteurs des
commentaires, MAGHREB STEEL n’aurait pas correctement prévu l’évolution du marché, ce qui aurait
faussé les estimations.
191. Le MDCCE estime que ces affirmations sont très discutables. En effet, d’après les informations
collectées auprès de MAGHREB STEEL, les postulats sur lesquels repose le plan d’affaires rédigé par
McLellan étaient réalistes et fondés sur les informations disponibles en 2006, en particulier, celles de
l’Institut international du fer et de l’acier (IISI). L’approche de McLellan a été très conservatrice, partant
des projections à court terme de l’IISI et complétées par des projections à plus long terme de
l’EconomicsIntelligency Unit (EIU) pour les diverses régions du monde. De plus, le consultant a prévu
une croissance prudente du marché au Maroc, forte aux étapes initiales mais qui s’atténue lors des
AD.4.13.UE/TUR
Non confidentiel
29
années suivantes.
192. Par ailleurs, un autre facteur évoquécomme cause du dommage réside dans l’appréciation de la
situation internationale du secteur de l’acier. Les exportateurs considèrent que MAGHREB STEEL n’a
pas su interpréter l’évolution du marché de l’acier.
193. Sur la base des données de MAGHREB STEEL, cette allégation peut être réfutée par les chiffres du
plan d’affaires. En tout état de cause, dès lors que le Maroc a connu une évolution positive de la
consommation de l’acier en général et des tôles LAC et TF en particulier, la situation du marché
international présente un poids relatif par rapport aux prix pratiqués dans ce pays. En effet, selon toute
logique économique, dans un cadre de demande nationale en croissance (et dans l’absence de
dumping des produits importés), le prix du produit concerné n’aurait pas dû baisser au sein du marché
marocain ou, tout au moins, pas connaître une sous-cotation. La contrainte de vendre à des marges ne
permettant pas de couvrir un bénéfice raisonnable est tout à fait inouïe dans un contexte
d’augmentation de la demande.
194. Par conséquent, le MDCCE juge que la conjoncture internationale du secteur de l’acier ne peut
constituer la cause, ou du moins la principale cause du dommage subi par la branche de production
nationale.
6.9CONCLUSION SUR L’EXISTENCE D’UN LIEN DE CAUSALITE
195. L’analyse ci-dessus a démontré que la part de marché des importations en dumping originaires de
l’Union Européenne et de la Turquie a augmenté de manière non négligeable.
196. La part de ces importations dans la production et la consommation nationale est à des niveaux
considérables au point qu’il porte atteinte au développement de la branche de production nationale.
197. Les données indiquent que la situation économique de la branche de production nationale s’est
nettement dégradée parallèlement à l’augmentation du volume des importations en dumping
originaires de l’Union Européenne et de la Turquie.
198. L’analyse ci-dessus a dûment opéré une distinction entre les effets de tous les facteurs connus sur
la situation de la branche de production nationale et les effets préjudiciables des importations en
dumping et les a analysés de manière séparée. Sur la base de cette analyse, le MDCCE conclut
provisoirement que les importations en dumping originaires de l’Union Européenne et de la Turquie
ont causé un dommage important prenant la forme de retard important dans la création de la branche
de production nationale.
199. Les facteurs connus autres que les importations en dumping ont été évalués conformément à
l’article 14 de la loi 15-09, et aucun élément permettant de prouver une rupture du lien de causalité
entre les importations en dumping et dommage subi par la branche de production nationale n’a été
constaté.
7. CONCLUSION GENERALE ET RECOMMANDATION
200. Au terme de ce rapport, et compte tenu des conclusions établies en ce qui concerne le dumping,
le dommage et le lien de causalité, le MDCCE estime que les conditions d’application d’une mesure
antidumping sont réunies et ce, conformément aux dispositions de l’article 5 de la loi n° 15-09.
201. Par ailleurs, Conformément aux dispositions de l’article 23 de la loi n° 15-09 qui stipule que :
« Dans le cas où l’évaluation préliminaire aboutit à la détermination à titre préliminaire de
l’existence d’un dumping ou d’une subvention spécifique, d’un dommage et d’un lien de
causalité, l’Administration peut, si elle le juge nécessaire et afin d’éviter des dommages
ultérieurs durant la période de l’enquête, appliquer, après avis de la Commission, une mesure
AD.4.13.UE/TUR
Non confidentiel
30
provisoire prise sous forme d’un droit antidumping provisoire »,
il a été décidé d’appliquer une mesure provisoire aux importations de tôles d’acier laminées à chaud
originaires de l’UE et de la Turquie, dans la mesure où l’analyse des statistiques d’importation a
démontré qu’au cours des cinq premiers mois de l’année 2013 (janvier à mai) le volume importé en
provenance des pays de l’Union européenne a représenté plus de 50% du volume importé en 2012
en provenance de ces mêmes pays.
202. Par conséquent et du point de vue du MDCCE, du moment que le volume des importations en
dumping réalisé en 2012 a été dommageable pour l’industrie nationale, il n’est pas à exclure
l’éventualité qu’à un niveau similaire en 2013, ces importations causeraient autant de dommage à la
branche de production nationale.
Tableau n°17 : Volume (en tonnes) des importations de tôles d’acier laminées à chaud
originaires de l’Union Européenne et de la Turquie
Union Européenne
Turquie
Total pays suspects de dumping
Année 2012
133 317
29 028
162 345
Janv-mai 2013
70 090
3 667
73 757
Part (%)
52,57
12,63
45,43
Source: Office des changes
203. Par ailleurs, et considérant le niveau élevé des marges de dumping obtenues pour certains
exportateurs et l’impact négatif qui pourrait résulter de l’application d’un droit antidumping si élevé
sur les secteurs utilisateurs et transformateurs des tôles d’acier laminées à chaud, il a été jugé plus
approprié d’appliquer un droit antidumping égal à la marge de sous cotation pour les cas où cette
dernière est inférieure à la marge de dumping, et ce conformément à l’article 32 de la loi 15-09.
204. Ainsi, le MDCCE recommande l’application, à titre provisoire, des droits antidumping tels que
présentés dans le tableau suivant.
Tableau n°18 : Droit antidumping provisoire par exportateur
Société
Origine
Taux de marge de dumping provisoire
ARCELOR MITTAL
Union européenne
29,12%
TATA STEEL
Union européenne
22,11%
STEEL LINK
Union européenne
22,11%
COLAKOGLU
Turquie
0%
ERDEMIR
Turquie
0%
Union Européenne,
Turquie
29,12%
Autres exportateurs
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Non confidentiel
31

Benzer belgeler

الــمـمــلــكــــــــة المــغــربـــيـــــــــــة

الــمـمــلــكــــــــة المــغــربـــيـــــــــــة d’acier laminées à chaud tels que identifiés par la requête (ARCELOR SERV, COMAPROM, TOUFER, BATIFER, SOFAFER, ETAF, TUBE ET PROFIL, AIC METALLURGIE, SOMACHAME, INTRAL INDUSTRIES, LONGOFER, D.L.M. ...

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