Vatanî vazife - Association des Revues Plurielles

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Vatanî vazife - Association des Revues Plurielles
Extraits
ALINTI
Vatanî vazife
Devoir patriotique
AZiZ NESÝN
IN
«
UN FOU SUR LE TOIT», LES ÉDITEURS FRANÇAIS RÉUNIS, 1969
TRADUIT DU TURC PAR
/
FRANSIZCASI: GEORGES DANIEL
VOIR HTTP://WWW.NESINVAKFI.ORG/
lllllllll
Cezaevi
dalgalandý, haber
bütün
koðuþlarda çalkalandý:
- Yahu, Vazelin Ýhsan enselenmiþ be…
- Deme!
- Namussuzum...
- Ulan, herif töbe etmiþti bu dalgalara...
- Ne zamandýr kahve iþletiyordu.
- Belki on sene var deliðe girdiði yoktu.
- Ýnanmayýn, yalandýr.
- Yalan deðil arkadaþým, akþam postasýnda Adliyeden getirmiþler, kapý altýnda
gördüm. Hamama girdi çýktý da, karantinaya
soktular bile...
- Bak ulan bak bee... Herif hapisanenin
yolunu unutmuþtu, tutup getirdiler ha...
- Abi, kim bu Vazelin Ýhsan?
- Siz onu tanýmazsýnýz. Onun zamanýna
yetiþmediniz. Ben Mehterhanenin sübyan
koðuþundayken tanýrým onu...
- O zaman daha bu hapisane yapýlmamýþtý
bilem... Mehterhane vardý, annýyo musun...
Biz orada yatardýk...
- Çok hýzlýdýr haaa, üstüne yoktur...
Vazelin Ýhsan’ý on beþ gün kaldýðý karantina koðuþundan, cezaevinin ikinci kýsým
koðuþlarýndan birine verdiler. Bütün yaþlý
sabýkalýlar, Vazelin Ýhsan’ý tanýyorlardý.
- Geçmiþ olsun Ýhsan aabi...
- Hoþ geldin Ýhsan aabi...
- Hangi iþten düþtün Ýhsan aabi?
Koðuþ ocaðýndan çaylar içildi. Vazelin
Ýhsan çay tepsisine, tam raconuyla bir yüz
liralýk attý. Demli çaylar tazelendi.
Vazelin Ýhsan nasýl piyastos olduðunu
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Les gens de la prison furent bouleversés
par la nouvelle qui retentit dans toutes les
cellules.
- Tu as entendu ? Ihsan-la-Vaseline vient
de tomber.
- Pas croyable !
- Je te le jure !
- Il avait pourtant renoncé à ce genre de
turbin.
- Il y a longtemps qu’il faisait marcher une
buvette.
- Ça fait au moins dix ans qu’il n’a pas été
en taule !
- Faut pas croire, c’est un mensonge !
- C’est pas un mensonge, mon vieux. On
l’a amené du Palais ce soir. Je l’ai aperçu
devant la porte. On l’a fait passer aux douches. Il est déjà à la quarantaine.
- C’est pas croyable… Le mec avait même
oublié l’adresse de la prison, et maintenant il
la retrouve.
- Qui est-ce, cet Ihsan-la-Vaseline ?
- Vous ne le connaissez pas, vous. Vous
n’étiez pas encore ici. Moi je l’ai connu à la
cellule des mineurs de la Mehterhane.
- A l’époque, cette prison-ci n’était même
pas construite. Il n’y avait que la Mehterhane,
tu comprends… On nous bouclait là-bas.
- C’est un caïd, tu sais ! Il n’y a pas plus
fort que lui.
Ihsan-la-Vaseline, après avoir passé
quinze jours à la quarantaine fut transféré
dans l’une des cellules de la deuxième division de la prison. Tous les vieux condamnés
anlatmaya baþladý. Beyler koðuþunun, zimmet
suçundan sekiz yýla hükümlü Nuri Bey’i
Vazelin Ýhsan’ýn karþýsýndaydý. Ellisini aþkýn
Vazelin Ýhsan, çevresinde sanki baþka hiç
kimse yokmuþ gibi, karþýsýnda oturup sedef
tesbih çeken, ayaklarý pantuflu, viþneçürüðü
renginde ropdöþambrlý Nuri Bey’e anlatýyordu.
- Nasýl oldu bu iþ Ýhsan Bey kardeþim?..
- Valla beyabi, þimdi ne desem yalan,
inanmýyacaksýnýz... Çünkü, bu baþýma gelenlere, ben de inanamýyorum. Bunca senedir bu
yolda saçýmýn kýlýný aðarttým, annýyo musun,
bööle bi dalga baþýma gelmemiþti. Þimdi siz
“Camiden tutup getirmiþler” diye alay edeceksiniz benimle ama, ondan beter namussuzum... Ben buraya bu sefer vatanî vazife
dolayýsýyla düþtüm, annýyo musun...
Benim bi kahvem var, kahvecilik yaparým,
annýyo musun... Bigün iki sivil geldi kahveye
“Az biþey Müdüriyete kadar geleceksin”
dediler. Eski polisler ben hep tanýrým... Bunlar
yeni yetiþme, annýyo musun, ben tanýmýyorum... Acý patlýcan yemedim ki karným aðrýsýn...
Tabiî gittik beyabi... Baktým, Tatlý Haydar...
Bizim hýzlý zamanýmýzda, annýyo musun, sivil
polisti, þimdi baþkomser olmuþ... Gözü biraz
hafif þehlâ olduðundan baygýn baygýn bakar
da, ondan Tatlý Haydar derler... Yoksa, Allah
inandýrsýn beyabi, arnavut biberinden acýdýr,
annýyo musun...
Tatlý Haydar’a:
- Bir emrin mi var aabi, beni
emretmiþsin...dedim.
- Buyur otur Ýhsan! dedi.
“Buyur, otur” diye yer gösterdiðine göre,
baþka bir dalgasý var. Yoksa benim bildiðim
Tatlý Haydar tekme sille, ana avrat adama.
Oturdum gösterdiði yere.
- Aabi, biliyorsun, dedim, bana artýk bu
yollar kesik; ben töbe islâh ettim, eski zenatý
terkledim.
- Senden istediðim biþey var, deyince ben
bozuldum.
Benden hiçbi istediði olamaz. Çünkü ben
son iþimde, herkesin payýný helâlinden vermiþtim de kendi payýmla da kahveyi açmýþtým.
- Aaabi, dedim, biliyormusun, ben o voliyi
vurduðum zaman herkesin hakkýný bi tamam
ödemiþtim, eksik olma, sayende paçamý
kurtarýp eski dalgalardan elimi ayaðýmý çekmiþtim. Geçmiþ hesaplar müruru zamana
uðrayýp kapandý, þimdi benden ne istiyor-
le connaissaient.
- Salut, Ihsan grand-frère !
- Sois le bienvenu, Ihsan grand-frère !
- Quelle affaire t’amène, Ihsan grand-frère ?
Sur le réchaud de la cellule on prépara
du thé. Ihsan-la-Vaseline jeta sur le plateau,
d’un geste étudié, un billet de cent livres. On
remplit à nouveau les verres.
Ihsan-la-Vaseline se mit à raconter comment il était « tombé ». En face de lui, était
assis Monsieur Nuri, condamné à huit ans
pour détournement de fonds. Ihsan-la-Vaseline, qui avait dépassé la cinquantaine, racontait son histoire à Monsieur Nuri qui, assis en
face de lui, égrenait son chapelet d’ambre,
les pantoufles aux pieds, habillé d’une robe
de chambre couleur bordeaux.
- Raconte-nous comment c’est arrivé,
Monsieur Ihsan, mon frère.
- Eh bien, grand-frère, tout ce que je vais
dire, vous ne le croirez pas, vous prendrez
cela pour des mensonges. Car, même moi,
je n’arrive pas à y croire. Mes cheveux ont
blanchi dans ce boulot, tu comprends, mais
jamais une histoire pareille ne m’est arrivée.
Je sais, vous allez dire « Il a l’air de prétendre qu’on l’a arrêté pendant qu’il priait à la
mosquée ! ». Je vous jure que c’est encore
plus invraisemblable que cela. Cette fois, je
me retrouve ici pour avoir voulu rendre service à la patrie. Tu comprends ?
Je tiens une buvette. J’y vends du café,
tu comprends ?... Un jour, deux agents en
civil y sont venus, ils m’ont dit « Il faut que tu
viennes un peu à la Boîte ». Je connais tous
les vieux agents. Mais ceux-ci étaient de la
nouvelle génération, tu comprends ? Je ne
les connaissais pas du tout. Comme j’avais
la conscience tranquille, je les ai suivis sans
crainte… Une fois là-bas, qui ai-je vu ? Haydar-le-Doux… A l’époque où j’étais un caïd,
tu comprends, il était agent en civil. Maintenant il est devenu commissaire principal.
Comme il louche légèrement, son regard en
devient un peu gentil. C’est pourquoi on l’appelle Haydar-le-Doux. Sinon, je te jure, grandfrère, qu’il est plus amer que le poivron d’Albanie, tu comprends ?...
- Tu m’as fait appeler ? Quels sont tes
ordres ? demandai-je à Haydar-le-Doux.
- Prends place, Ihsan, s’il te plaît, me
dit-il.
- Je me suis dit « S’il me parle sur ce
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sun?
Ben böyle nezaket dairesinde diklenince:
- Eski hesaplar kapandý, þimdi o defterleri
açma! Dedi, benim seni buraya çaðýrmamýn
sebebi þu ki, sen þimdi memlekete vatanî
vazife yapacaksýn.
Bizim bildiðimiz vatanî vazife nedir beyabi;
askerlik dii mi? Tamam! Demek beni askerlik
dalgasý için çaðýrtmýþlar.
Tatlý Haydar’a:
- Aman aabi, dedim, ayaðýný öpeyim, ben
bu vatanî vazifeyi bahriyede yaptým, hem de
tamamý tamamýna altý sene. Kasýmpaþada
Divanhanesinin camialtýnda hapis yattýðým
aylarý da hesaba katmýyorum. Çok firarlý
olduðumdan, Allahýma þükür, altý senede
vatanî vazifemi bitirdim. Yaþ elliyi geçti aabi,
þimdi benden daha ne vatanî vazifesi istiyorsunuz?
Ben böyle söyleyince, annýyo musun, Tatlý
Haydar bana bi kahve söyledi, bi de cýgara
verdi. Ossaat çakýz oldum, annýyo musun;
bunlar benden, vatanî vazife dalgasýynan, zarlarýna bakmamý istiyorlar. Benim kahve ocaðý
iþliyor ya herkesin gözü bende...
- Aabi, dedim, vatanî vazife diyerekten
baþka bi emrin varsa, açýk et, buyur,
canbaþüstüne... Kahve ocaðý benim deðil,
senin...
Tatlý Haydar:
- Sen yanlýþ anladýn, dedi, bu seferki
vatanî vazife askerlik iþi deðil, baþka bi iþ...
Bu bir memleket vazifesi... Sen þimdi, memleketimizin ve de hükûmetimizin yüzünü akedeceksin evelâllah... Hükûmetimizin sana gayetle ihtiyacý var ki, anlatýlýr gibi deðil...
- Aman aabi, dedim, benimle kýyak dalga
geçiyorsun, kurban olayým aabi, ben kimim
ki, koca bi hökûmat benim gibi bir eski
yankesici parçasýna muhtaç kalsýn!
Tatlý Haydar:
- Hükûmettir bu, dedi, hükûmetin iþi hiç
belli olmaz, sýrasý gelir, her bir vatandaþýna
muhtaç olur. Þimdi sen de bir vatandaþ
olaraktan, hükûmet senden bir vatanî vazife
bekliyor.
- Buyur aabi, dedim, mâdem iþin içinde
vatan dalgasý var, annýyo musun, boynum
kýldan ince, öl de öleyim...
Bunun üzerine beyaabi, Tatlý Haydar bize
durum vaziyetini açýk etti.
Efendime söyliyeyim, annýyo musun, bizim
memlekete gayetle kalabalýk bi ecnebiye
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ton, c’est qu’il y a anguille sous roche ».
Car Haydar-le-Doux, tel que je le connais,
entame ses dialogues avec des insultes et
des coups de pied.
Je me suis assis.
- Tu le sais bien, grand-frère, lui dis-je, je
ne m’occupe plus de ces choses-là. Je me
suis repenti, j’ai quitté la profession.
- J’ai quelque chose à te demander, me
dit-il.
Ce propos me mit en boule. Il ne pouvait
me demander quoi que ce soit parce que
moi, lors de ma dernière affaire, j’avais distribué à chacun sa part, et ensuite, avec la
mienne, j’avais ouvert cette buvette.
- Ecoute, grand-frère, dis-je, tu sais bien
que lors du dernier coup, j’avais versé les
parts entières de chacun, et grâce à ta bonté,
j’avais pu me tirer d’affaire et renoncer à mes
activités. Tous ces comptes maintenant sont
enterrés. Que peux-tu bien me demander ?
Après mon speech si poli, il me répondit :
- Ne me parle plus de ces vieux comptes. Ce sont des registres clos à jamais. Si je
t’ai appelé ici, c’est parce que tu dois maintenant accomplir un devoir patriotique.
Vous savez ce qu’on appelle communément le « devoir patriotique ». Le service militaire, n’est-ce pas ? Bon. Donc, il m’avait fait
venir pour une histoire d’armée.
- Ecoute, grand-frère, dis-je à Haydar-leDoux. J’ai accompli mon devoir patriotique
dans la marine. Cela m’a pris six années
entières. Je ne compte pas les mois passés
en prison militaire. Comme bien souvent je
désertais, j’ai pu finir avec l’aide de Dieu,
mon service en six années. Maintenant, j’ai
dépassé la cinquantaine, grand-frère. Quel
devoir patriotique exigez-vous de moi ?
Après ce propos, tu comprends, Haydarle-Doux a commandé un café pour moi et
m’a offert une cigarette. A cet instant, j’ai tout
saisi, tu comprends ! Sous prétexte de devoir
patriotique la police voulait que je lui graisse
un peu la patte. Comme ma buvette rapporte
pas mal, on me remarque facilement.
- Ecoute, grand-frère, dis-je, si en parlant
de devoir patriotique tu veux exprimer un
ordre quelconque, dis-le ouvertement. Viens
chez moi ; tu seras le bienvenu… La buvette
n’est pas à moi, mais à toi.
- Tu as mal interprété, répondit Haydar-le-
heyeti gelmiþ. Bunlarýn içinde Amerikan,
Alaman, Danimarkan, Fransiyadan, her bi
yandan adam varmýþ... Ondan sonra, tüccarý,
doktoru, müvendizi, porofesürü, her bi çeþit
adam varmýþ içinde... Bunlar bizim memleketin her bi yanýný inceliyorlarmýþ da ona
göre hükûmete mangýr yardýmýna gelmiþler,
annýyo musun... Velâkin, bu heyet her nereye
gitmiþse, bizim iþlerin hiçbirinden memnun
kalmamýþ. Orman demiþler, orman iþimizi
beðenmemiþler, annýyo musun... Hastane
demiþler, hasta iþlerimizi beðenmemiþler,
annýyo musun... Fabrika demiþler, fabrika
iþlerimizi beðenmemiþler, annýyo musun...
Bunun üzerine hükûmet çok fena bi halde
mahcup kalmýþ ecnebiyyeye karþý... Hükûmet
demiþ ki, aman demiþ, biz bu ecnebiye heyetine biþiyimizi beðendirelim, demiþ...
Bunlarý Tatlý Haydar bana anlattýktan
sonra:
- Ýþte, dedi, þimdi iþ sana düþüyor
Ýhsan’cým; bu bir vatanî vazifedir.
Benim anladýðým kadarý, bizim hükûmet
bu ecnebiye heyetine hiç biþiy beðendiremeyince, demek bi de hýrsýzlarýmýzý görün
demeðe getiriyor ki, bana iþ düþüyor...
Tatlý Haydar’a:
- Çaktým aabi, dedim, bizde gayet hýzlý hýrsýzlýk olduðunu göstereceðiz yani ki, ecnebiye
heyeti de “Her biþiy kötüyse de hýrsýzlýklarý
gayetnen kuvvetli” desinler ve de hýrsýzlýðýmýzdan memnun kalsýnlar...
- Aþaðý yukarý öyle biþiy, dedi, þimdi biz
bu adamlara bizde polisin çok kuvvetli olduðunu, çok iyi çalýþtýðýný isbat edeceðiz.
- Biraz zor aabi... dedim.
- Evet, zor...dedi, biz de seni onun için
çaðýrdýk ya...
Sen þimdi bize eski bir sabýkalý olarak,
namlý bir yankesici olarak, usta bir hýrsýz
olarak yardým edeceksin ve de vatanî vazife
yapacaksýn...
Tatlý Haydar’ýn lâflarýndan iyice aklým
karýþtý benim.
- Ne gibi yani aabi? dedim
Açýk etti. Bana heyetin kaldýðý oteli gösterecek. Heyetin adamlarýný tanýtacak, annýyo
musun… Ben de heyet adamlarýný çarpacaðým, Allah ne verdiyse üstlerindekini yürüteceðim, annýyo musun... Tabiî herifler “Vay
yandým...” diyerekten bizim polise gidecekler.
Bizim polis de onlara “Hiç merak etmeyin,
bizde polislik gayetnen kuvvetlidir, þimdi
Doux. Cette fois, le devoir patriotique ne veut
pas dire service militaire. Il s’agit d’une autre
affaire. C’est un service à rendre au pays.
Avec l’aide de Dieu tu vas sauver maintenant
l’honneur de notre pays et de notre gouvernement… Notre gouvernement a tellement
besoin de toi… tellement qu’il est même difficile de l’expliquer.
- Dis donc, grand-frère, m’exclamai-je, tu
me mets en boîte pour de bon. Qui suis-je,
moi, le misérable, pour qu’un gouvernement
aussi grand ait besoin de moi, d’un minable
voleur en retraite ?
- Les agissements d’un gouvernement ne
sont jamais prévisibles, dit Haydar-le-Doux. Il
peut brusquement avoir besoin de n’importe
lequel de ses citoyens. Et maintenant de toi,
en tant que citoyen, le gouvernement attend
un devoir patriotique.
- Raconte, grand-frère, dis-je. Puisqu’il est
question de patrie là-dedans, tu comprends,
mon cou est plus mince qu’un cheveu, je
suis prêt à mourir si cela peut être utile.
Sur ce propos, grand-frère, Haydar-leDoux m’a expliqué la situation.
Voilà ! Tu comprends, dans notre pays
est arrivée une grande délégation étrangère.
Parmi ces gens, il y en a qui sont américains, allemands, danois, français…Des
gens de partout, quoi… Il paraît qu’il y en a
qui sont commerçants, d’autres sont médecins, d’autres ingénieurs, professeurs… Des
gens de toutes sortes, quoi… Ils examinent
tous les coins de notre pays et d’après ce
qu’ils voient, donnent du fric au gouvernement, tu comprends… Seulement voilà ! Il
paraît que partout où cette délégation est
passée, elle a trouvé dégueulasse tout ce
qu’elle a vu… Ils sont allés voir les forêts, ils
ont trouvé dégueulasses nos forêts, tu comprends… Ils ont visité les hôpitaux, ils ont
trouvé dégueulasses nos hôpitaux tu comprends. Ils sont allés dans les fabriques, ils
ont trouvé dégueulasses nos fabriques, tu
comprends ?...
Sur ces faits, le gouvernement s’est trouvé
terriblement gêné envers l’étranger… Le gouvernement s’est dit « Il faut absolument que
quelque chose chez nous plaise à cette délégation étrangère ».
Haydar-le-Doux m’ayant raconté tout cela
ajouta :
- Maintenant il faut que tu « fonctionnes »,
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beþ dakkada þýp diye enseleriz!” diyecekler,
annýyo musun... Ben heriflerden çarptýðýmý
getirip polise vereceðimden, çalýnan malýný
adama verip “Buyrun, iþte malýnýz!” diyecekler. Onlar da, annýyo musun, vay anasýný
amma da polis be... diye apýþacak enayiler!
Nah þu nimet gözüme dursun aabi, Tatlý
Haydar’a:
- Yapamam aabi, dedim.
- Neden? dedi
- Bi kerem, dedim, ben bu zenatý terkliyeli
çok oldu, antrenmaným yok bir...
- Anlamam, araklýyacaksýn... dedi.
- Töbe ettim, iki... dedim.
- Tavuk götü tövbe tutmaz oðlum Ýhsan...
dedi.
- Yeni bitme gayetnen hýzlý yankesiciler
var aabi, bu vatanî vazifeyi onlara verseniz
daha kýyak olur...dedim.
- Yeni yetmelerin sütü bozuk oluyor,
dedi, onlara hiç güvenemeyiz. Çünkü herifler çarpar, soyar, sonra malý getirmez bize,
tüyerler... Artýk iþin yoksa ara dur... Heriflere
polisi beðendirelim derken, bir de üstelik
rezil oluruz. Bize senin gibi namuslu bir hýrsýz
lâzým!
- Affet aabi, ayaðýný öpeyim aabi,
yapamam aabi... dedimse de:
- Sen bilirsin Ýhsan, dedi, bak benden
günah gitti, sen bu vatanî vazifeyi yapmazsan,
kahvene baskýn vereceðim. Senin kahvede
“keriz” olduðunu biliyoruz, “nefes” sattýrdýðýný
biliyoruz... Düþün artýk, sen bilirsin...
Baktým yollar kesik, mecburî kabul ettim.
- Yalnýz aabi, dedim, mangýrsýz olmaz
vatanî bir vazife... Ben arakladýðýmý getirip
verdim diyelim, biz ne anlýyacaðýz bu iþten?
Tatlý Haydar kýzýp da:
- Vatanî vazife dedik sana, utanmýyor
musun para istemeye? diye baðýrýnca:
- Aabi kýzma, dedim, bak meselâ sen de
polislik ederek vatanî vazife yapýyorsun, ama,
aydan aya mangýrýný da alýyorsun. Mangýrýný
almasa meselâ, milletvekilleri vatanî vazifelerini yapar mý? Arkadaþlýk baþka, vazife
baþka... Ýþ baþka, þaka baþka... Din iþleri
baþka, dünya iþleri baþka... Vatanî vazife
baþka, mangýr dalgasý baþka...
- Peki, dedi, madem öyle, kahvende
serbetsin, her istediðini yaparsýn... Yalnýz,
unutma, heyetten birinden biþey arakladýn mý,
hiç vakit kaybetmeden hemen buraya damla
ki, biz de adamlara çalýnan malýný bulduk
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mon cher Ihsan, il s’agit d’un devoir patriotique.
D’après ce que j’avais compris, la délégation étrangère n’ayant rien apprécié chez
nous, le gouvernement se proposait de lui
dire « Voyez un peu nos voleurs » et c’est là
que je devais fonctionner.
- J’ai saisi, grand-frère, dis-je à Haydarle-Doux. Nous allons leur montrer notre virtuosité dans le vol pour que ces étrangers
disent « Tout va mal chez eux, mais pour
ce qui concerne le vol, c’est franchement
formidable » et qu’ils apprécient notre côté
voleur.
- C’est à un peu près cela. Nous allons
maintenant prouver à ces gens que la police
chez nous est très forte, qu’elle fonctionne
parfaitement.
- Ce sera un peu difficile, grand-frère,
dis-je.
- Tu as raison, répondit-il. C’est pourquoi
nous avons fait appel à toi. Maintenant en
tant qu’ancien détenu, en tant que voleur
illustre, en tant que maître de cette profession, tu vas nous aider et accomplir un devoir
patriotique.
Les paroles d’Haydar-le-Doux m’ont complètement embrouillé les idées.
- Explique-toi mieux, grand-frère.
Il expliqua. Il allait me montrer l’hôtel où
habitait la délégation, me faire connaître les
délégués, tu comprends ?... Moi, je devais
piquer à ceux-ci, embarquer tout ce qu’ils
possèdent, avec l’aide de Dieu, tu comprends ? Bien sûr, ces types allaient se
rendre chez notre police, en hurlant : « Je
me meurs » et celle-ci allait leur dire : « Ne
vous en faites pas, chez nous la police est
extrêmement puissante, d’ici cinq minutes,
nous aurons retrouvé le criminel. » Tu comprends ?... Comme j’allais déposer chez la
police les objets volés, ils allaient les remettre
à leur propriétaire en disant « Prenez, voilà
votre bien ! ». Alors les étrangers, tu comprends, allaient rester bouche bée, comme
des cons, en disant « Merde alors, quelle
police ! ».
Je jure que j’ai répondu à Haydar-le-Doux :
- Je refuse, grand-frère.
- Pourquoi, dit-il.
- D’abord, ai-je dit, il y a longtemps que
j’ai abandonné le métier, je manque d’entraînement…
diye þýp verelim...
- Olur aabi...
Bana ecnebiye heyetin kaldýðý otelin adresini verdi, adamlarýn eþkâlini de anlatýp resimlerini gösterdi:
- Haydi Allah rastgetire... Göreyim Ýhsan,
bütün ümit sende. Heyetin Baþkanýný çarpabilirsen daha da iyi... Güle güle... dedi.
Beyabi, bizim için bu iþler lokum yemekten
kolay... Otelin önüne durdum, dikize geçtim.
Akþama doðru bunlar çýktý. Elimdeki resimlere baktým, tamam, heyetin reizi, madamasý
da yanýnda... Reizi bi göðüsledim, göðüslememle çarýðýn yerini þavulladým. Tamam diyorum sana... Ýkinci göðüslemede çarptým, tam
aldým çarýðý... Demek zenatý unutmamýþýz.
Hemen voltamý aldým, doðru Taksim’deki
umumî helâlara... Çarýðý açtým beyabi, içi
silme gâvur parasý... Allah seni inandýrsýn,
þeytana uymadým, içinden bi kapik almadan,
annýyo musun, götürdüm müdüriyete... Tatlý
Haydar beni görünce:
- Nerdesin be kardaþým... diyerek boynuma sarýldý.
Çarýðý verince, alnýmdan öptü:
- Ulan aþkolsun, þerefimizi kurtardýn...
dedi.
Ecnebiye heyetinin reizi de, aman cüzdan
gitti diyerek beþ dakka önce gelmiþ... “Hiç
merak etme, yarýna kalmaz buluruz, bizde
polis gayetnen kuvvetlidir“ demiþler.
Tatlý Haydar’a:
- Vatanî vazifemi yaptým, hadi bana
eyvallah...dedim.
- Aman dur, dedi, bu bi kereylen olmaz,
durmadan çarpacaksýn herifleri...
- Aabi, yapma, elim alýþacak, sonra kendimi tutamam... dedimse de dinletemedim,
annýyo musun...
Baþladým ben bu ecnebiye heyeti adamlarýný çarpmaya... Hele bikerem, heyetten
birinin bütün ceplerini boþalttým... Çarýðý býrak
efendi, herifin anahtarlarýni, mendilini, çakmaðýný, cýgarasýný, pantalon cebindeki bozuk
paralarý, ceket yakasýndaký rozeti aldým, enayi
hâlâ uyuyor. Beyabi, herifin pantalonunu ayaðýndan söküp alsam, ruhu duymayacak...
Ondan sonra, kendi kendime ulan Ýhsan
dedim, annýyo musun, þu herifin sök düðmelerini... Adamýn elbisesinde düðme býrakmadým.
Verdim, Kazancý yokuþundan aþaðý...
Doðru Müdüriyet... Tatli Haydar’ýn önüne malý
- Je ne veux rien savoir. Tu vas voler,
dit-il.
- Et deuxièmement, j’ai juré de ne plus
recommencer.
- On peut jurer autant qu’on veut, ça n’a
aucune importance, mon fils Ihsan… m’a-t-il
dit.
- Nous avons une nouvelle génération de
voleurs, très habiles, grand-frère, dis-je. Si
vous leur confiez ce devoir patriotique, ce
serait plus juste.
- On ne peut pas compter sur les nouveaux, dit-il. Ils ne nous inspirent pas confiance. Ils sont capables de voler et ensuite
de disparaître sans nous rapporter leur butin.
Il faudra ensuite les chercher longtemps !...
Au lieu de faire admirer notre police aux
étrangers, nous risquerions de nous couvrir
de ridicule. Il nous faut quelqu’un comme toi,
un voleur honnête !
Je l’ai supplié longtemps de ne pas me
mêler de cette histoire, mais il me dit :
- Fais comme tu veux, Ihsan. Mais je
te préviens, si tu refuses ce devoir patriotique, nous organiserons bientôt une descente dans ta buvette. Nous savons que tu
vends de la came. Tu es prévenu, tu agiras
comme bon te semble.
Vu cette situation, réalisant que toutes les
routes étaient coupées, il fallut accepter.
- Seulement, grand-frère, dis-je, le devoir
patriotique ne se fait pas sans fric. Supposons que je rapporte tout ce que je vole.
Quel bénéfice vais-je tirer de cette affaire ?
Haydar-le-Doux se mit en colère et hurla :
- Je te parle d’un devoir patriotique.
N’as-tu pas honte de réclamer du fric ?
- Ne te fâche pas, grand-frère. Toi par
exemple, en travaillant dans la police tu
accomplis toi aussi un devoir patriotique,
mais tu touches bien du fric tous les mois.
Les députés, par exemple, feraient-ils leur
devoir patriotique si on ne les payait pas ?
L’amitié c’est une chose, le devoir c’en est
une autre… Le travail c’est une chose, la plaisanterie c’en est une autre… Les affaires religieuses sont une chose, les affaires de ce
bas monde c’en est une autre. Le devoir
patriotique est une chose, le problème du
fric c’en est une autre.
- Bon. Puisque c’est comme ça, tu seras
désormais libre de faire ce que tu veux dans
ta buvette ; seulement, n’oublie pas ceci :
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yýðdým.
- Aferin ulan Ýhsan, gözüme girdin, sana
bu yollar helâl... dedi.
- Aabi, dedim, herifi otelin önünde hamama
girmiþ gibi çýplak býrakacaktým, ama acýdým
fukaraya...
Uzatmayalým beyabi, ben bunlarý erkeðini,
karýsýný on beþ gün sövüþledim. Evelâllah,
operatör doktor ameliyatý gibi, ben bunlarýn
ciðerini söker, yürütürüm de, röntgene girmezlerse haberleri bile olmaz, annýyo musun,
ciðersiz yaþar enayiler...
Tatlý Haydar’a:
- Aabi, izin ver, þu ecnebiye heyeti reizinin
ciðer ve dalak takýmýný ameliyat edeyim...
dedim.
Gülüyor Tatlý Haydar...
Sonra beyabi, heyette bi de karý var
afferdersin, ben bu karýnýn elindeki çantasýný
açýp, içindekileri sövüþledim. Götürüp Tatlý
Haydar’a verdim. Velâkin, kadýn gelip de
polise, benim biþeyim çalýndý demiyo... Bunun
üzerine, ecnebiye lisaný bilen bi polis açtý
telefonu bunlara:
- Acaba biþeyiniz çalýndý mý? diyerekten
sordu.
- Çalýnmadý... demiþler.
Polis de:
- Ýyice arayýn her yanýnýzý, çalýnmýþ olmasý
lâzým... demiþ
Ýyice aranýnca:
- Evet, bizden bir hanýmýn çantasý
boþalmýþ... demiþler.
- Çantada penbe bi bez var mýydý?
Demiþ.
- Evet vardý... Ama siz nerden biliyorsunuz? demiþler.
- Bizde polis gayet kuvvetlidir, biz biliriz...
demiþ.
Sen þu bizim polisin kuvvetine bak beyabi,
malýn sahibine, daha malý çalýnmadan, senin
malýný çalacak hýrsýzý yakaladým, diye haber
verecek...
Heyet giderken, bizim gazeteciler:
- En çok neyimizi beðendiniz? diye sormuþlar.
Ecnebiye heyetinin reizi, terbiye icabý
cevap vermeyince, gazetecinin biri lâfa çanak
tutup:
- Bizde polis çok kuvvetlidir... demiþ.
Adam da bunun üzerine dayanamayýp:
- Biz dokuz kiþiyiz, Ýstanbul’da on beþ gün
kaldýk, her birimiz doksan kere soyulduk...
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dès que tu as piqué quelque chose à un
délégué, tu dois immédiatement venir ici,
pour que nous puissions, à l’instant, remettre
au propriétaire l’objet volé.
- D’accord, grand-frère.
Il me donna l’adresse de l’hôtel, décrivit
les délégués et me montra leurs photos.
- Allons, que Dieu te guide… Tous nos
espoirs et nos vœux t’accompagnent, mon
cher Ihsan. Si tu arrives à voler le chef de la
délégation, ce sera encore mieux… Au revoir,
me dit-il.
Ce genre de travail, pour nous, est plus
facile que de manger du loukoum, grandfrère. Je me suis mis en face de l’hôtel pour
observer l’entrée. Vers le soir, ils sortirent.
Je vérifiai d’après la photo. C’était bien ça.
Voici le chef de la délégation avec sa gerse
à ses côtés. Je suis rentré dedans. Dès le
premier contact, j’ai découvert l’endroit du
morlingue. Exactement. Au deuxième choc,
je l’ai enlevé. Il faut croire que ce métier ne
s’oublie pas si vite que cela. Aussitôt j’ai pris
la fuite, quelques instants après je me suis
retrouvé dans les W.C. publics de Taksim…
J’ai ouvert le morlingue, grand-frère. Il était
bourré de billets de banque étrangers. Eh
bien, crois-moi, je n’ai pas écouté la voix du
diable, je n’y ai pas pris un kopek, tu comprends, j’ai tout emporté à la Boîte.
- Te voilà, enfin, mon frère, dit en m’apercevant Haydar-le-Doux et il m’embrassa.
Quand je lui ai donné le morlingue, il me
posa un baiser sur le front.
- Bravo, dit-il, tu nous as sauvé l’honneur.
Il paraît que le chef de la délégation étrangère s’était pointé cinq minutes auparavant
en pleurant son porte-feuille ! Ils lui avaient
répondu « Ne t’inquiète pas, nous retrouverons cela d’ici demain. Chez nous la police
est très puissante ».
- J’ai accompli mon devoir patriotique. Je
te salue bien bas et je m’en vais, dis-je à
Haydar-le-Doux.
- Attends, attends, me dit-il. Une fois, c’est
pas suffisant. Tu dois piquer à ces types
sans arrêt.
- Je t’en prie, grand-frère, ne me demande
pas ça. Mes mains vont s’habituer à nouveau et ensuite, je ne pourrai plus me retenir.
Je l’ai supplié longtemps mais il n’a pas
Sizde polis kuvvetli ama, hýrsýzlar polisten
daha kuvvetli... demiþ
Adamýn bu lâfý gazetelerde çýktý mý: Ecnebiye heyeti reizi, Türkiye’de hýrsýzlýk çok kuvvetli ve geliþmiþ dedi.
Benim bunda kabahatim var mý, ayaðýnýn altýný öpeyim... Bizimkiler kýzmýþ buna.
Vayy... Enselediler mi beni... Yahu, arakla
dediniz arakladým. Vatanî vazife dediniz,
annýyo musun, eyvallah dedik... Beni piyastos ettiler.
Tatlý Haydar’a:
- Ben bu dalgayý anlatýrým hâkime...
dedim.
- Ulan, öyle biþey yaparsan, faili meçhul
yüz hýrsýzlýk var, hepsini yýkarým üstüne, bir
de itiraf ettirip zabýt tutarým, bin sene çýkamazsýn kodesten... dedi.
Tamam mý beyabi, ben mahkemede dut
yemiþ bülbül... Yedik iki sene cezayý annýyo
musun...
Vazelin Ýhsan’ý dinleyenlerden biri:
- Sen iki sene cezayý peynir ekmek gibi
yersin aabi, dedi, sað yanýndan sol yanýna
dönünceye kadar iki sene geçer.
Vazelin Ýhsan:
- Orasý öyle, dedi, velâkin bu yaþtan sonra
koyuyor adama... Bereket versin, yalnýz bi
iþten mahkemeye verdiler de, iki seneyle kurtuldum. Kendi payýma ben vazifemi yaptým,
vatan saðolsun...
q
voulu m’écouter, tu comprends.
Je me suis donc mis à piquer à tous
les membres de la délégation. Surtout une
fois, j’ai vidé toutes les poches de l’un d’eux.
Je ne me suis pas contenté de prendre
son morlingue, grand-frère. Je lui enlevai ses
clefs, son mouchoir, ses sèches, le fric qui
se trouvait dans la poche de son pantalon, la
rosette épinglée sur le revers du veston. Il ne
s’apercevait toujours de rien, l’imbécile. Je
te jure, grand-frère, si je lui avais enlevé son
pantalon, même ça il ne l’aurait pas remarqué… Après quoi, je me suis dit « Eh bien,
Ihsan, enlève donc tous les boutons de ce
type ». Je n’ai pas laissé un seul bouton sur
son costume.
Je suis descendu par la côte de Kazanci,
je me suis retrouvé à la Boîte. J’entassai tout
cela devant Haydar-le-Doux. « Bravo, Ihsan,
tu es vraiment admirable, tu montes dans
mon estime », me dit-il.
Je lui dis :
- Tu sais, grand-frère, je voulais le déshabiller complètement devant l’hôtel, pour qu’il
se retrouve comme sous la douche ! Mais
j’ai eu pitié de ce malheureux.
Bref, grand-frère, pendant quinze jours,
je les ai volés tous, les hommes aussi bien
que les femmes. Avec l’aide de Dieu, je
suis capable, comme un grand chirurgien,
de leur enlever leurs poumons et d’emporter
ceux-ci ! Ils ne le remarqueront même pas,
à moins de passer une radio à l’hôpital. Ils
vivront sans poumons, les imbéciles, tu comprends.
- Je te demande la permission, grandfrère, d’opérer le chef de la délégation et de
te rapporter son foie et sa rate, dis-je à Haydar-le-Doux.
Il riait.
Ensuite, grand-frère, j’ai ouvert le sac
d’une femme, membre de cette délégation et
j’ai ramassé tout ce qu’il y avait dedans. J’ai
tout remis à Haydar-le-Doux mais la femme
ne faisait aucune réclamation à la police.
Alors un agent connaissant les langues
étrangères leur téléphona :
Est-ce que rien n’a été volé chez vous ?
leur demanda t-il.
- Non, répondirent-ils.
- Cherchez bien partout, il y a certainement quelque chose qui a été volé, dit le
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policier.
Après beaucoup de recherches, ils ont
répondu :
- Oui, le sac d’une des femmes a été
vidé.
- Y avait-il dans ce sac un morceau de
tissu rose ? demanda le policier.
- Oui, c’est exact… Mais comment le
savez-vous ? dit l’étranger.
- Chez nous la police est très puissante,
nous savons tout, répondit le policier.
Tu te rends compte, grand-frère ! La puissance de notre police ! C’est tout juste s’ils
n’avertissent pas les gens avant qu’ils soient
volés et ne leur amènent le voleur.
Au moment du départ de la délégation,
les journalistes ont demandé à ses membres
:
- Qu’est-ce que vous avez apprécié le
plus chez nous ?
Comme le chef de la délégation, par politesse, gardait le silence, l’un des journalistes
le provoqua en disant :
- Chez nous, la police est très habile.
Alors le bonhomme, ne pouvant plus
résister, dit ce qu’il avait à dire :
- Notre délégation comprend neuf membres, nous avons passé quinze jours à
Istanbul, chacun de nous a été volé quatre-vingt dix fois. Votre police est certainement forte, mais les voleurs sont encore plus
forts.
Le lendemain, tous les journaux publiaient
cette déclaration du type : « Le chef de la
délégation étrangère a déclaré qu’en Turquie
le vol était fort développé. »
Non, mais franchement, y suis-je pour
quelque chose ? Les nôtres m’en ont voulu,
paraît-il. Derechef ils m’ont pincé. « On
m’avait dit de piquer et moi j’ai piqué ; on
m’avait dit devoir patriotique, j’avais dit d’accord. » Ils m’ont envoyé en cabane.
- Je raconterai ce coup au juge, dis-je à
Haydar-le-Doux.
- Fais gaffe, si tu oses faire cela, je t’accuserai d’une centaine de vols dont on n’a
pas trouvé les auteurs, je te ferai avouer, je
dresserai un procès-verbal et tu ne pourras
pas ressortir de taule pendant au moins mille
années.
Donc, grand-frère, au tribunal j’ai gardé
le silence comme un rossignol qui aurait
bouffé des mûres. J’ai pris deux ans, tu com-
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prends.
Un de ceux qui écoutaient Ihsan-la-Vaseline lui dit :
- Deux années pour toi passeront bien
vite, grand-frère. Le temps que tu retournes
du flanc droit sur le flanc gauche, deux
années s’écouleront.
Ihsan-la-Vaseline répondit :
- Ça, c’est vrai. Pourtant à cet âge-là, je
trouve ça vexant ! Heureusement qu’ils ne
m’ont accusé que d’un seul délit et j’ai pu
m’en tirer avec deux années. Pour ce qui me
concerne, j’ai accompli mon devoir. Vive la
patrie !
q

Benzer belgeler

S E R G E S A F R A N

S E R G E S A F R A N - Raconte, grand-frère, dis-je. Puisqu’il est question de patrie là-dedans, tu comprends, mon cou est plus mince qu’un cheveu, je suis prêt à mourir si cela peut être utile. Sur ce propos, grand-fr...

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